Inspirer petits et grands cœurs
Par : Marie-Claude Lessard
Queen of Katwe est l’un de ces feel good movie basé sur une histoire vraie dont on connaît l’issue avant même que le générique d’ouverture ne débute. À l’instar de sa réalisation linéaire, sa promotion de valeurs telles que le respect, l’entraide et la persévérance manque cruellement de raffinement. Film familial typique que l’usine Disney a l’habitude de produire et continuera d’engendrer pendant des lustres, l’œuvre de Mira Nair (La foire aux vanités) a néanmoins le mérite de mettre en lumière de formidables acteurs et d’inspirer petits (et grands) qui n’ont pas laissé leurs sens de l’émerveillement au vestiaire.
Katwe, Ouganda, en 2007. La jeune Phiona Mutesi (Madina Nalwanga) vit dans une pauvreté extrême avec ses frères, sa sœur et sa mère veuve (Lupita Nyong’o). Après avoir passé la journée à vendre du maïs à des passants, elle et son frère Benjamin se rendent aux cours d’échecs gratuits du professeur Robert Katende (David Oyelowo). Ce dernier se rend vite compte du talent inné de Phiona qui développe des stratégies phénoménales sans même étudier les rudiments du sport, ce qui l’amènera à concourir dans plusieurs tournois prestigieux.
En guise d’amorce, on a droit au fameux flashback se déroulant lors d’un championnat important pour mieux démontrer tout le chemin qu’a dû parcourir l’héroïne. Cette construction narrative fort convenue ne réserve aucune surprise et provoque d’inévitables longueurs. Heureusement, les quatre années de l’existence de Phiona qui sont relatées comportent un bon lot de rires, spécialement grâce aux réactions spontanées des jeunes comédiens. On s’attache aux personnages, à leur triste sort et à la ténacité dont ils font preuve, et ce, même si la morale est soulignée à grands traits dans la plupart des répliques, particulièrement celles de Katende. L’intensité émanant des scènes dans lesquelles les protagonistes jouent aux échecs s’avère juste assez accrocheuse pour maintenir l’intérêt, mais elle aurait pu être plus haletante. Les mouvements des pions, par exemple, procurent très peu de stress.
Propulsé par un récit rappelant le charmant Akeelah and the Bee, Queen of Katwe possède toutes les caractéristiques nécessaires pour tirer les larmes. Ce n’est pas subtil, certes, mais ça fonctionne. Non pas grâce à la composition musicale mélodramatique, mais plutôt à cause de l’authenticité des interprétations. Madina Nalwanga, dont il s’agit de la première expérience cinématographique, impressionne et s’avère incroyablement juste et efficace. Elle n’en met jamais trop et partage une complicité irrésistible avec tous ses partenaires de jeu. À ses côtés, Lupita Nyong’o, récipiendaire d’un Oscar, fait encore une fois l’étalage de ses talents en campant une mère monoparentale fière et épuisée. Charismatique, David Oyelowo fait sourire à plusieurs reprises et insuffle à son rôle des nuances profondément vraies et captivantes.
Le moment le plus touchant de l’œuvre réside à l’intérieur du générique de fin lorsque les acteurs interagissent avec les personnes qu’ils personnifient. Donc, ne quittez pas la salle à la hâte! Pour l’instant, le film est seulement présenté en version originale anglaise. Espérons qu’une traduction française (ou avec des sous-titres) verra le jour sous peu.
Note: 3.5/5
Texte révisé par : Jean-Philippe Côté-Hallé