Une forêt des mal-aimés toujours aussi adorée
©Martial Genest/MatTv.ca
En 2006, soit deux ans après la parution de son album éponyme, Pierre Lapointe a vendu plus de 30 000 copies de La forêt des mal-aimés lors de sa première semaine de sortie, solidifiant ainsi sa place privilégiée dans le cœur des Québécois. Une décennie plus tard, l’intérêt ne se dément pas, comme en témoigne les nombreux spectacles à thématiques variées (Mutantès, Seul au piano…) et les participations régulières à des émissions de variété ( juge à La Voix III et IV, Stéréo Pop). Toutefois, le 11 juin dernier aux FrancoFolies, à l’occasion du dixième anniversaire du disque La forêt des mal-aimés, les fans de la première heure ne demandaient pas mieux que de se replonger dans cette forêt teintée de vers mélancoliques et de mélodies orchestrales.
Sur la scène extérieure principale, le grand chouchou des Francos n’a pas présenté une version intégrale de l’album, mais bien le spectacle qu’il a joué à travers la province jusqu’en 2007. Devant respecter la règle de ne pas interpréter des chansons ayant été composées après cette année-là, l’artiste s’est prêté à la carte de la nostalgie jusqu’au bout en s’accompagnant des musiciens d’origine (Josiane Hébert au piano, Guido Del Fabro aux cordes, Philippe Brault à la basse, Philippe B. aux guitares et Tony Albino à la batterie). Fidèle à lui-même, c’est vêtu d’un habit coloré (mais moins flamboyant de ce que nous sommes maintenant habitués) rappelant un papillon que Pierre Lapointe a accueilli ses chers mal-aimés fébriles. Nostalgiques, ces derniers ne se sont pas fait prier pour crier à tue-tête et scander les paroles sans la moindre trace d’hésitation. Malgré toutes ces années passées, les anciennes chansons de Lapointe, toujours aussi tristes mais comprenant des arrangements sonores moins enthousiastes, n’ont pas perdu de leur actualité et leur pertinence. Revoir ce spectacle après 10 ans a procuré le même effet que de relire un livre d’enfance marquant: même si nos expériences et valeurs ont modifié nos impressions sur celui-ci, il n’en demeure pas moins que l’amour inconditionnel qu’on lui porte reste essentiel à notre existence. Entendre le piano simple mais farouchement bouleversant de Étoiles étiolées, Plaisirs dénudés, Reine Émilie, Le lion imberbe, Au 27-100 rue des partances, Tel un seul homme et À vous a rajeuni, revigoré et rassasié le public assoiffé de poésie enveloppante ravivant l’âme.
À l’intérieur d’un sobre décor orné d’élégantes projections de vitraux et de tapisseries abstraites, le personnage scénique du chanteur s’est fait moins narcissique et condescendant qu’à l’accoutumé. Visiblement émotif et touché par la vague d’amour qui déferlait sur lui, Pierre Lapointe a laissé ses oeuvres parler pour lui, proposant une soirée magique inoubliable dans laquelle les moments épiques se sont succédés. Parmi ceux-ci, notons la magistrale Endomètre rebelle, l’enivrante Au nom des cieux galvanisés, l’incontournable Deux par deux rassemblés, les déhanchements timides mais hilarants pendant Qu’en est-il de la chance? et l’étonnamment rassembleuse Le columbarium.
Avant de procéder à un deuxième rappel (la poignante Pointant le nord qui m’a, je l’avoue, arraché les larmes), Pierre, à l’instar de son dernier passage à Tout le monde en parle, a profité de la tribune qui lui était offerte pour faire un éditorial nécessaire – et fort acclamé – sur l’importance de consommer la culture d’ici. Quelques instants avant de quitter la scène pour de bon, le principal intéressé a parfaitement résumé cet événement unique: « Je sais que j’ai dis que je chantais des chansons tristes, mais vous entendre les chanter avec moi m’a donné de la joie. Cet album m’a aidé à m’épanouir en tant qu’artiste, et il a l’air d’avoir fait plaisir à ben du monde! » En effet, Pierre, et on t’en remercie infiniment.
Pour connaître les projets futurs de Pierre Lapointe, consultez son site officiel.
Crédit photos : Martial Genest/MatTv.ca
Texte révisé par : Bella Richard