un magazine web axé sur la culture d’ici

ANNA – ces trains qui foncent sur moi

Déluge de mots

Théâtre du Nouveau Monde
Crédit photo : Christophe Pean

Par : Jean-Claude Sabourin

La pièce de théâtre écrite par Steve Gagnon rassemble 14 personnages pour une longue fin de semaine de retrouvailles. Donner la parole à autant d’individus et conserver un propos cohérent représente un défi de taille. C’est le pari risqué que le Théâtre du Nouveau Monde affiche sur ses planches en ce moment dans le spectacle mis en scène par Vincent Goethals.

Dès le départ, on comprend que l’on se verra englouti par le verbe. Les héroïnes et leurs pendants masculins sont issus du monde de la politique; là où la langue est agile et acerbe; là où les mots sont le principal outil de travail. Néanmoins, on le sait, le débit « élocutoire » en politique mène souvent nul part.

C’est un peu ce qui émane de la pièce au premier abord. L’inondation verbale nous empêche de bien comprendre les liens claniques. D’autant plus qu’il y a une disparité d’accents (québécois et français) qui participe à une certaine confusion. À cet égard, tant qu’à faire ce choix de la diversité, on aurait pu aller un peu plus loin.

Aussi, bien que de chaque personnage émergent des vagues successives de phrases bien construites, aux mots scintillants, ils ne se dévoilent jamais vraiment. Ils se tamponnent à force d’intelligence, titillant le cerveau de spectateur, mais pas tant son âme. On peut rire parfois de ces mots d’humour acide, mais on cherche quand même les tenants et aboutissants du récit.

Anna
Crédit photo : Christophe Pean

L’arrivée d’Alexis à la fin de la première partie du spectacle apporte une certaine dose d’espoir au spectateur cartésien et confus. Un espoir que l’on nourrit plus tard autant de souffre que de miel. Bien sûr, on finit par comprendre le désarroi d’Anna et de plusieurs autres personnages, mais on se noie aussi dans un exposé bariolé combinant liberté et nature sauvage.

La fable finale du spectacle est aussi obscure qu’une abysse, et l’on finit par ne pas bien saisir le niveau de ressources intérieures qui ont poussé et qui poussent les personnages à fléchir ou à infléchir. De toute évidence, une personne meurt, mais à quoi cette mort rime-t-elle?

TNM
Crédit photo : Christophe Pean

Les trains foncent sur nous tous, en tout temps. Des myriades de mots ne semblent pas être un obstacle suffisant pour les arrêter. J’ose espérer qu’il y a d’autres bassins que la mort dans lesquels plonger pour éviter l’impact.

Un mot pour dire comment l’utilisation de l’espace sur scène est judicieuse, comment la mise en scène est efficace et à quel point Steve Gagnon surfe brillamment sur ses propres mots.

Les autres membres de la distribution sont : Marie-Josée Bastien, Annick Bergeron, David Boutin, Lise Castonguay, Violette Chauveau, Frédéric Cherboeuf, Véronique Côté, Sophie Desmarais, Clément Goethals, Édith Patenaude, Marc Schapira, Julie Sommervogel et Salim Talbi.

Les billets pour la pièce sont disponibles ici.

Cet article pourrait vous intéresser :

Qu’est-ce qu’on a fait au Bon Dieu ?