Il y a parfois de ces rencontres!
Par : Lynda Ouellet
Saviez-vous qu’en 2017, lors d’une entrevue accordée à un journaliste de Rotterdam, Yannick Nézet-Séguin a avoué avoir jeté un disque d’un enregistrement d’une symphonie de Bruckner tellement il l’avait détesté? Heureusement pour nous, il s’est réconcilié avec lui depuis. C’est à la suggestion de sa professeure de musique qu’il est allé à la rencontre de la Neuvième Symphonie dirigée par le chef Skrowaczewski et l’OSM à la basilique Notre-Dame de Montréal. Yannick Nézet-Séguin avait alors 14 ou 15 ans. Et, il eut une révélation.
À ce jour, son allégeance envers le compositeur est basée sur l’aspect spirituel et le fait que Bruckner compose pour rejoindre les auditeurs dans une écoute collective ce qui constitue l’essence même de son oeuvre.
Frissons assurés!
C’est donc en ce dimanche après-midi, 22 septembre, à la Maison symphonique que le chef Yannick Nézet-Séguin nous présente Figures légendaires. Comme à son habitude, Yannick Nézet-Séguin nous donne le contexte de ce que nous entendrons. Au menu, Mamachimowin d’Andrew Balfour suivi de la Symphonie n° 9 et du Te Deum de Bruckner.
Œuvre courte mais poignante!
D’une durée de six minutes, la composition du chef autochtone Andrew Balfour est chantée divinement par le Chœur Métropolitain sous la direction de Pierre Tourville et de François A. Ouimet. Elle met en évidence la difficile relation entre la culture de la religion catholique et la spiritualité du peuple autochtone. En traduisant le Psaume 67 en crie, Balfour explore ce sujet. Est-ce que la musique peut unir la religion et la spiritualité?
En nomination pour le prix Juno 2023 du meilleur album classique, cette brève création invite au recueillement avec l’œuvre chorale-orchestrale Mamachimowin (L’acte de chanter des louanges) et favorise une réflexion sur cette question. Yannick Nézet-Séguin et le Chœur Métropolitain révèlent la beauté de l’œuvre, et l’auditoire est immédiatement captivé.
Montagnes russes d’émotions!
Ensuite, place aux musiciens de l’OM et de leur chef pour la dernière œuvre inachevée de Bruckner la Symphonie n° 9. Yannick-Nézet Séguin a choisi de la compléter en s’inspirant des suggestions que Bruckner a faites avant son décès soit d’y ajouter pour la finale : Te Deum, un hymne d’action de grâces.
Tout au long des soixante-trois minutes que dure la Symphonie n° 9, on assiste à une montagne d’émotions, et les frissons sont assurés. La puissance dégagée par les musiciens lors de la montée du mouvement vif et gai (appelé scherzo) est à couper le souffle. S’ensuit le tempo lent (appelé adagio) qui ramène au recueillement. À trois reprises, on assiste à cette impressionnante danse entre les instruments et un chef en pleine possession de ses moyens.
Une main de maître, tout simplement!
Impressionnant de voir Yannick Nézet-Séguin diriger son orchestre sans aucune partition, et nous ne voyons pas plus les musiciens tourner les leurs. Pour l’hymne finale, Latonia Moore (soprano), Jennifer Johnson Cano (mezzo-soprano), Limmie Pulliam (ténor), Ryan Speedo Green (basse) et le Chœur Métropolitain se joignent à l’OM pour entamer une des plus anciennes prières de Saint-Ambroise datant du Ve siècle. La main du maître est tout simplement suffisante à créer l’unité totale, et la beauté indéfectible que cette œuvre de Bruckner évoque.
Pour vous dire, quand l’OM et Yannick-Nézet Séguin sont à l’œuvre, émoi et frémissements sont également au rendez-vous. À noter, si vous n’avez pas encore vécu l’expérience Yannick-Nézet Séguin, ne manquez pas ses prochaines représentations où il fera un marathon Beethoven d’une durée de trois jours soient les 17, 18 et 20 octobre 2024. À voir sans faute!