Survol de quatre projets marquants
Par : Marie-Claude Lessard
Rencontré au café Les Entretiens quelques semaines précédant le 31e Gala des Prix Gémeaux, James Hyndman a fait preuve d’une honnêteté désarmante et rafraîchissante concernant son métier. Affirmant que sa passion pour le jeu n’est plus aussi brûlante qu’autrefois mais toujours bien présente lorsque vient le temps de tout donner sur un plateau de tournage, l’acteur, qui est présentement en écriture d’un premier roman, s’est confié sans complaisance sur trois projets marquants et un futur qui prendra d’assaut le Théâtre du Quat’Sous à compter du 26 septembre prochain.
Boris sans Béatrice
James Hyndman, qui tournera un long-métrage cet automne, n’était pas apparu de manière significative au grand écran depuis Souvenirs Intimes de Jean Beaudin, paru en 1999. Le réalisateur Denis Côté a remédié à la situation en lui offrant le rôle principal de Boris sans Béatrice qui a connu une courte carrière en salle en mars 2016. N’entretenant aucune amertume sur le fait que lui et le cinéma se soient délaissés mutuellement pendant des années, Hyndman a précisé que ce qui importe pour lui, c’est de travailler avec des artistes stimulants qui veulent réellement de ses services. « Au cinéma, tu n’as pas à faire tout le travail. Les plans parlent. Les cadres parlent. Les silences parlent. Tu es porté par quelque chose de plus grand que toi. Denis Côté m’a dit que, lorsqu’il écrivait le scénario de Boris sans Béatrice, il me voyait dans sa soupe. C’est merveilleux sentir qu’un réalisateur travaille pour toi. »
Dans Boris sans Béatrice, James incarne Boris Malinovsky, un millionnaire condescendant qui se voit forcer à remettre sa vie en question à la suite de la grave dépression de sa femme Béatrice (Simone-Élise Girard), constat que doit faire l’acteur après chaque projet. « Je remets en question mon statut d’artiste tous les jours! C’est particulier parce que tu travailles, t’es dans une passe où tu travailles beaucoup, tu te réchauffes. Du coup, aller travailler, monter sur scène, aller devant la caméra font partie de ta routine. Plus tu te sens réchauffé, plus t’es meilleur. Et puis là, t’arrêtes de travailler parce que les contrats sont finis, parce qu’on ne t’en a pas offert d’autres ou parce que ce qu’on t’a offert ne correspondait pas à ce que tu souhaitais faire. Donc, tu rentres un peu dans une période d’hibernation. Donc, quand tu reviens de cette période, tu te demandes toujours si tu vas avoir l’énergie encore d’avoir des journées de douze/quinze heures, de devoir apprendre des pages de textes, de toujours être à on. Mais bon, quand le rôle est bien écrit et qu’il te parle, tu n’es pas capable de dire non. »
Présenté en première mondiale et en compétition officielle à la Berlinale, Boris sans Béatrice a reçu des critiques mitigées. « Quand on dit mitigé, les gens en concluent tout de suite que le film a été mal reçu, mais ça n’a pas été le cas, surtout au Québec. Je pense que le film aurait mérité d’être vu par plus de monde. Et comme beaucoup d’autres films québécois, il n’a été à l’affiche que deux semaines, et après, c’est fini. Donc, le film n’a pas eu la chance de trouver son public. Je ne dis pas que son public aurait été large, mais il y aurait eu un public. Heureusement, il est présenté dans les vols d’Air Canada! »
Au secours de Béatrice
En 2016, James Hyndman a offert une prestation remarquable et mémorable dans la tout aussi excellente série Au secours de Béatrice. Pour le rôle de François Bélanger, atteint de troubles mentaux, le comédien a obtenu une nomination aux Gémeaux dans la catégorie de la meilleure interprétation masculine dans un second rôle dans une série dramatique annuelle, reconnaissance qui lui a fait extrêmement plaisir. « Quand c’est un rôle que tu as à cœur, ça fait toujours plus plaisir, comme quand j’ai gagné mon premier prix pour Rumeurs. J’étais très content. Et si jamais je gagne à nouveau (pour Au secours de Béatrice), ça me ferait TRÈS plaisir! » D’ailleurs, James a remporté la statuette tant convoitée (et méritée) le 18 septembre dernier. Très content de ce sacre, il a profité de la tribune qui lui a été accordée pour mettre en évidence les gens aux prises avec une maladie mentale, ce qui a donné lieu à un discours de remerciement fort touchant.
Lors de notre rencontre au café, il avait également glissé un mot sur la réaction du public face au personnage de François Bélanger imaginé par l’auteure Francine Tougas. « Je travaille depuis huit ans avec Les Impatients. J’ai aussi puisé dans mes propres maladies mentales! Plus que jamais dans ma vie, j’ai reçu des témoignages. Il y a eu une avalanche de mails à mon agence et sur la page Facebook de l’émission. Beaucoup de gens m’ont arrêté dans la rue pour me dire que je les avais fait pleurer. Le grand désarroi touche des zones profondes chez tout le monde. »
La préparation de ce rôle complexe n’a pas été, étonnamment, aussi ardue que l’on pourrait le croire. « C’est Sophie (Lorain) et Alexis (Durand-Breault) qui m’ont contacté pour ce rôle. C’est rare que ça l’arrive, mais j’ai lu les textes et j’ai tout de suite su ce que je voulais faire avec le personnage et quels étaient les pitons en moi pour le jouer. J’ai pas eu à chercher très longtemps, au contraire. Ce qui était très nouveau pour moi, c’est que j’ai senti que je ne devais pas travailler du tout le personnage parce que, si j’allais trop travailler le texte, j’allais rationnaliser le personage alors que je devais suivre mon instinct pendant le tournage et ne pas réfléchir avant. Il y a aussi l’instinct d’acteur qui a du métier qui embarque, car si François craque dans une scène, on va jouer d’autres couleurs dans la suivante. Donc, t’organises ton travail et tu te laisses aller en même temps. »
Rumeurs
Rumeurs, irrésistible comédie signée Isabelle Langlois, a révélé James au grand public grâce à Benoit Dumais, personnage emblématique à la fois détestable et attachant. Créé en 2006, James Hyndman ne conserve que de beaux souvenirs de cette période charnière dix ans après. « Il y a plein d’acteurs qui ne vivent pas une seule aventure comme cela dans leur parcours, alors ça a été une grande chance de faire partie de cette aventure-là pour moi et tous les comédiens impliqués. Ça n’arrive pas souvent un truc si brillamment écrit qui est dans l’air du temps. La bande de comédiens n’avait pas eu la chance avant de jouer des rôles comme ça. Tout le monde était bon. Ça marchait, on avait un fun noir sur le plateau. Tout le monde était parfait pour chacun des rôles. On était dans un genre de comédie qui n’avait pas été fait comme ça avant au Québec. Ce n’était pas des punchs avec des rires en canne. C’était drôle et enlevant. C’était sharp, bien bouclé en une demi-heure. Ça a valu beaucoup de reconnaissance à tous. L’amour du public a été super. »
Le théâtre des écrivains
Depuis maintenant quatre ans, James et Stéphane Lépine proposent quatre lectures par année au Théâtre du Quat’Sous pour faire découvrir, sous différents thèmes, des textes fabuleux. Cette année, avec Le théâtre des écrivains, James s’attaquera aux pièces d’auteurs célèbres reconnus plutôt pour leurs romans que pour leurs efforts théâtraux. Après un énorme travail de recherche dirigé par Lépine, James lancera le projet le lundi 26 septembre avec la pièce Pour un oui ou pour un non de Nathalie Sarraute qu’il interprétera en compagnie de Christian Bégin. « J’ai envie d’aller ailleurs et d’essayer de nouvelles choses. C’est des rendez-vous importants. D’ailleurs, je fais des lectures au Salon du livre de Trois-Rivières depuis huit ans. J’ai également été faire des lectures au nouveau Musée des beaux-arts de Québec. Plusieurs billets pour le spectacle du 26 septembre ont déjà été vendus. J’en suis très content. »
Texte révisé par : Annie Simard