Le striptease selon Dita Von Teese
©Benoit Vermette/MatTv.ca
Déesse de l’amour, reine du burlesque, la célèbre Dita Von Teese était à Montréal dimanche dernier. Malgré le froid glacial dehors, c’est une foule bien réchauffée qui était entassée dans l’Olympia pour une représentation du Grand Cabaret Burlesque. Après des mois à suivre son compte Instagram et, avouons-le, des années à être fascinée sur son numéro de la coupe de martini, elle revenait enfin à Montréal, après plus de 10 ans d’absence. Entre temps, l’artiste est devenue une icône de la mode, a atteint des sommets inégalés dans la sphère artistique et remit l’art de l’effeuillage au goût du jour.
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La soirée était organisée par Speakeasy Burlesque et Lavender May, artiste burlesque montréalaise reconnue mondialement. C’est elle qui a lancé les festivités avec son éclatant numéro Lavender Follies. Avec ses consœurs Lou Lou la Duchesse de Rière et Mimi Cherry, qui a offert l’une des meilleures performances ce soir-là, Lavender May se situe dans un style néo-burlesque classique. Fortement inspirées de l’imagerie pin up, les artistes prenaient la pose à chaque morceau enlevé, du corset au porte-jarretelles, en prenant bien soin de terminer par les pastilles arrogantes. Elles gagnent à tout coup à ce jeu de séduction, auquel le public se laisse volontiers prendre. Ce public qui était, ma foi, bien endimanché! La salle était bondée de filles aux coiffures élaborées et aux robes affriolantes, et de messieurs à la moustache et aux chaussures cirées. Pendant quelques heures, on flottait entre les années 1920 et 1950.
Les habitués des spectacles burlesques connaissent le rôle-clé de l’animateur dans ces soirées. Le maître de cérémonie est un élément central de ces cabarets érotiques. Ce personnage un peu grivois taquine le public et interagit avec les stage kitten qui font le ménage de la scène entre les numéros en aguichant les spectateurs. Même avec Les jumelles (dont la présence était un peu fade), on cherchait la complicité entre les protagonistes. Ses animations étaient longues, décousues et elles ne présentait pas dignement les artistes. Dommage que ce Pinot Noir ait été bouchonné, notre appréciation du spectacle aurait été de loin meilleure!
Des numéros très réussis que ceux puisant dans l’exotisme des autres cultures. Nadia a présenté une danse du ventre traditionnelle, parée d’une jupe dorée, hypnotisant le public avec ses hanches. Nous étions en pâmoison devant la reine égyptienne The Foxy Lexxi dans un numéro chorégraphié à plusieurs. La mise en scène rappelait les clichés des films d’époque où l’Égypte semble figée dans le temps des pharaons. Le numéro s’est terminé avec les servantes versant du lait sur sa peau d’ébène soyeuse. Un moment fort visuellement qui n’était pas sans rappeler la légende de Cléopâtre.
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Au-delà de l’effeuillage, le public a eu droit à plusieurs performances de danse et de cirque, notamment avec la troupe Cirquantique et son trio de femmes fortes, clin d’œil à l’évolution des performances féminines dans l’histoire des spectacles cabarets, de même que la contorsionniste Priscilla qui a donné chaud aux amateurs de moto dans la salle. Mentionnons aussi la sublime performance de Shy Shy Schullie (que vous aurez peut-être reconnue de La Voix) dont la voix feutrée nous ramenait dans l’époque jazz du redlight montréalais.
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Pour son numéro Circus, Rainbow Drag nous a transporté dans un autre style de cabaret avec son lipsync sur I’m an albatraoz de AronChupa, commençant d’abord sur un unicycle puis enchaînant les sauts avec ses bottes à talons hauts. La performance très dance pop tranchait avec le style rétro qui régnait depuis le début du spectacle. C’était rythmé, dynamique, ludique, et totalement assumé. Rainbow Drag est un vrai entertainer et tenait la foule au creux de sa main. C’est lui qui aurait dû animer la soirée!
Si plusieurs performeuses excellaient dans l’art du « strip », peu maîtrisaient l’art du « tease » comme Dita. Ses deux (seuls) numéros nous l’ont bien prouvé. Dès sa première apparition, plus d’une heure après le début du spectacle, la plus belle femme du monde a emballé les spectateurs avec un numéro d’effeuillage digne de son rang. Vêtue d’une somptueuse robe mauve et d’un corsage noir, raffinée jusqu’au bout des doigts, chacun de ses gestes était calculé et porteur d’une envie, d’un désir, d’une confidence. L’aura de Dita Von Teese lui profère une grâce semblable à ce qu’on retrouvait chez les icônes du cinéma à l’âge d’or Hollywood. Il est impossible de détourner le regard lorsqu’elle est sur scène tellement elle est magnétique. Une fois départie de sa robe, ses grands éventails de plumes et son air distingué suffisaient à l’habiller.
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Nous avons tous été aveuglés par le scintillement des 250 000 cristaux Sarowky que Dita Von Teese a revêtus (et dévêtus) pour son deuxième acte, le mythique numéro Le bain. Sentant l’impatience de la foule qui réagissait aussitôt qu’elle effleurait les rebords de la coupe à martini géante, Dita Von Teese a cependant bien pris son temps pour enlever chaque morceau de vêtement avec gestes délicats et regards coquins. Dans le burlesque, bien que la nudité soit l’aboutissement du numéro, c’est tout le processus qu’on apprécie chez l’artiste. La sensualité des mouvements, la démarche langoureuse et les regards mystérieux contribuent à teaser le spectateur. C’est l’érotisme à son meilleur, qui en dévoile juste assez pour stimuler l’imagination.
Parée de cette lingerie étincelante, elle a monté délicatement les escaliers avant de se glisser dans la coupe de martini. La foule était au comble de l’excitation. Von Teese pataugeait et a pris souvent la pose et sortit de l’eau au-dessus de son verre, arrosant même les spectateurs les plus proches. Plusieurs auraient donné leur chemise sur le champ pour être à la place de l’olive gonflée d’eau qu’elle pressait contre son corps! Le numéro s’est terminé sur une pose gracieuse, qu’elle a tenu toute la durée du salut final des artistes. Deux numéros, c’est toutefois bien peu pour la renommée dont bénéficie Dita Von Teese. Les attentes des montréalais étaient élevées, mais elles ont été comblées, quelques éclaboussements en plus!
Au final, Le Grand Cabaret aura été un succès et permit aux amateurs du style de s’offrir un grand rassemblement, et aux néophytes de se rincer l’œil sur d’agréables performances. Nul besoin d’attendre que la prêtresse du burlesque Dita Von Teese revienne pour aller voir des spectacles; Montréal est une scène où évoluent plusieurs artistes burlesques reconnus internationalement. Vous pouvez les retrouver au Speakeasy Burlesque, au Blue Light Burlesque, au Cirque de boudoir, au Festival Burlesque de Montréal et d’autres soirées thématiques. Le Cabaret Loly’s de Cirquantique prendra d’ailleurs place au Théâtre Rialto le 11 mars. BonBon Bombay sera également en spectacle avec sa troupe Blue Mushroom Sirkus Psyshow à la TOHU dans le cadre de la Nuit Blanche de Montréal en lumière.
Strip Strip Hourra!
#DitaVonTeeseMTL
Crédit photos: Benoit Vermette/MatTv.ca