Théâtre transgressif
© Hugo B. Lefort
Par : Sébastien Bouthillier
Paul Ahmarani pète deux fois sur scène dans Prouesses et épouvantables digestions du redouté Pantagruel. Le pèlerin qu’il incarne s’est faufilé dans la salade du géant pour que l’ogre l’avale tout rond. Il veut découvrir l’autre moitié du monde, comment se passe la digestion dans les entrailles gargantuesques.
Trois comparses rejoignent le pèlerin dans l’estomac de Pantagruel, dont Renaud Lacelle-Bourdon dans la peau de Ponocrate, le professeur de littérature. Dans cette moitié du monde, c’est dire l’immensité du ventre du géant, la règle d’imitation est la seule qui guide la communauté d’utopistes. Lorsque l’un fait quelque chose, tous font la même chose.
La recherche du pèlerin pour établir irréfutablement les faits sera interrompue par Cynthia Wu-Maheux en Panurge, son amoureuse, qui convainc le reste de la bande que le propre de l’homme c’est le rire. Il ne leur reste plus qu’à se goinfrer puis à rire le reste de leur vie jusqu’à… mourir de rire.
Le metteur en scène Philippe Cyr capte l’actualité de Rabelais, qui dépasse les normes de la rectitude politique : « Son univers est volontairement transgressif, inattendu et surtout il fait appel à une logique qui ne répond pas aux mêmes codes que la nôtre. »
Rabelais a rédigé le roman Pantagruel en 1532, puis Gargantua deux ans plus tard. II a contribué à la Renaissance et à l’essor du français, qui devient langue officielle du royaume de François 1er en 1539. Anticlérical et humaniste, il a forgé de nouveaux mots en se référant au français médiéval, aux dialectes régionaux et aux langues étrangères.
Soucieux d’érudition et d’exactitude, Rabelais ne néglige pas le rire pour autant puisqu’il cisèle avec finesse calembours, contrepèterie et autres figures stylistiques. La voix suave de Dany Laferrière narrant l’action berce les spectateurs. La pièce régale les adolescents, friands de tester les limites.
Prouesses et épouvantables digestions du redouté Pantagruel, au Théâtre Denise-Pelletier jusqu’au 20 cotobre.
Texte révisé par : Annie Simard