Un film d’ados de la trempe de Juno
Par : Marie-Claude Lessard
Selon Hollywood, les adolescents ne sont que des êtres paresseux sans talent ni ambition qui ne vivent que pour une seule chose : perdre leur virginité dans un party complètement bourré. Heureusement, depuis environ une décennie, les jeunes âgés de 11 à 17 ans peuvent se reconnaître plus réalistement dans les œuvres cinématographiques leur étant destinées. 17 ans sérieusement (version française de The edge of seventeen), à l’affiche dès aujourd’hui, s’inscrit immanquablement dans la lignée des Juno et The spectacular now en proposant un portait incroyablement juste sur la peur et la colère reliées au fait de devenir adulte (enfin, en théorie !).
Un brin conformiste avec son imagination délurée et son coloré style vestimentaire disparate, Nadine (Hailee Steinfeld) ne s’est jamais sentie à sa place. Elle ne partage pas les goûts et les valeurs de sa génération, à commencer par la musique. Lorsque son principal allié, son père, disparaît tragiquement de sa vie, elle s’accroche à son unique amie, Krista (Haley Lu Richardson).
Or, lorsque cette dernière s’amourache du frère plus-que-parfait de Nadine (Blake Jenner), le monde s’écroule. En suivant les conseils de son prof préféré (Woody Harrelson) et accumulant les rendez-vous avec Erwin, un collègue de classe (irrésistible Hayden Szeto), Nadine tente tant bien que mal d’entrer dans le moule. Mais, est-ce la meilleure chose à faire ?
The edge of seventeen ne fournit pas de réponses limpides, et c’est tant mieux. Kelly Fermon Craig, qui signe ici sa toute première réalisation et son deuxième scénario, n’infantilise aucunement son public cible. Elle lui parle avec un humour acerbe et des répliques cinglantes, et transpose ceux-ci dans une facture visuelle invitante qui esquive une surutilisation d’outils technologiques (textos, applications mobiles…). Les personnages évitent également les clichés. Ils ont des personnalités attachantes parfaitement imparfaites.
Le public n’a pas à supporter les élucubrations de la belle blonde, de l’adonis joueur de football et des enseignants accomplissant leur travail machinalement. Il a plutôt droit à un défilé d’ados craquants qui bégaient en invitant une fille à sortir, qui commettent des erreurs au nom de l’amour et qui se questionnent sur le vrai sens de la vie. Bref, ils agissent comme tout être humain normal.
Évidemment, le script ne dissimule pas un suspense haletant. En fait, les intrigues tournent un peu en rond en fin de parcours, mais il est impossible de ne pas se laisser bercer par le charisme naturel de Hailee Steinfeld et les petits drames familiaux auxquelles elle confronte. La jeune comédienne et chanteuse ne donne jamais l’impression qu’elle joue. Elle se contente d’être Nadine. Sans censure. Même lorsque la protagoniste tape un peu sur les nerfs avec ses réactions exagérées et simplistes, Steinfeld ne cherche pas à plaire, ce qui donne droit à une performance authentique qui risque d’être vivement encensée. De son côté, le toujours investi et mordant Woody Harrelson incarne avec brio un professeur qui s’avère être à la fois le pire et le meilleur éducateur au monde !
Bref, 17 ans sérieusement s’avère l’un de ces feel good movie qui réjouit autant qu’il fait réfléchir parce qu’il a été conçu avec doigté et intelligence. Véritable vent de fraîcheur dans le paysage cinématographique pour adolescents, on espère ardemment qu’il engendra d’autres Nadine ou Erwin !
Note : 3,5/5
Texte révisé par : Ho-Chi Tsui