Dans la tête de Philippe Brach
© Jean-François Leblanc
Par : Maxime D.-Pomerleau
Après avoir passé la journée à verser des larmes d’émotion à regarder les vidéos de gens réunis pour chanter du Leonard Cohen, c’est à Coup de cœur francophone, dans une ambiance radicalement différente, que j’ai passé la soirée du 12 novembre. Bienvenue à Enfant-Ville, c’est d’abord l’album Portrait de famine reproduit en musique 8-bit, soit dans la langue de Mario Bros. Mais c’est aussi un spectacle concept qui était cher au cœur de Philippe Brach et dont il nous a fait cadeau samedi dernier.
Après être passée au bar à bonbons et avoir vu le cuisinier d’Enfant-Ville découper en morceaux un gummy bear géant, on se doutait que la soirée ne s’adressait pas aux enfants. Philippe Brach a fait une entrée remarquée sur la musique du film culte Rosemary’s Baby, costumé et maquillé, avec un visage qui faisait beaucoup plus peur à voir de proche que de loin! Il a ouvert avec Né pour être sauvage et Downtown, après lesquelles il nous a présenté ses mascottes géantes, les oursons Trashy et Trashette. Dans Si proche et si loin à la fois et Race-Pape on décelait des échos de la langue et du grain de voix de Dédé Fortin, alors que son aisance et son dynamisme sur scène n’étaient pas sans rappeler ceux de Yann Perreault, une autre bête de scène. En plus du groupe complet, Brach était aussi accompagné du quatuor à cordes Quatuor Orphée, déguisées en princesses pour l’occasion.
Brach s’est permis de faire une reprise de Black Swan de Thom Yorke, appuyée par beaucoup de reverb dans la voix. Lui et son guitariste ont aussi interprété Ressac sur ta peau en version acoustique, ainsi qu’une nouvelle chanson.
© Jean-François Leblanc
Après un entracte de 1200 secondes où l’on a pu entendre une partie de l’album Bienvenue à Enfant-Ville, la foule a scandé le décompte des dix dernières secondes comme si c’était le jour de l’An, démarrant sur-le-champ la seconde partie du spectacle. L’Amour au temps du cancer, Bonne journée, succulente pour son ironie et la très belle Alice étaient bien sûr au rendez-vous. « Vous êtes rentrés dans mon cœur, maintenant c’est à vous de rentrer… » « DANS MA TÊTE! » a terminé la foule. Cette pièce qui a contribué à faire connaître le talent et la singularité de Brach est toujours un succès auprès du public.
Une surprise n’attend pas l’autre dans l’univers de ce génie créatif, et le clou de la soirée était renversant. Lorsqu’il a annoncé le nom de l’invitée spéciale qui se joignait à la population d’Enfant-Ville, la foule du Club Soda était en délire. Croulant sous les hurlements et les applaudissements du public, Carmen Campagne s’est présentée sur scène pour interpréter La moustache à papa avec Philippe Brach, qui s’en était justement collé une à la mode hitlérienne. S’en suivit le refrain de la célèbre Lucy in the Sky with Diamonds, où les collaborateurs du chanteur sont tous venus sur scène, dans une extase lumineuse, entourés de bulles, de confettis et de ballons de plage lancés de la mezzanine.
© Jean-François Leblanc
Alors que la foule, sous le choc, se demandait ce qui venait de se passer, Brach a poursuivi le spectacle avec Le bonheur tousse moins qu’avant, précisant à la foule que c’était la dernière chanson, mais qu’il restait un rappel de deux pièces, la recette habituelle quoi. Les joyeux lurons n’ont donc pas quitté la scène pour rien et ont interprété en clôture la ritournelle de Gaston et D’amour, de booze, de pot pis de topes. Un cocktail à l’image de l’artiste incandescent, qui discutait récemment de l’usage du cannabis dans son processus créatif avec Urbania.
On sait bien que la proximité qu’offre Montréal entre les artistes et l’appui d’un festival comme Coup de cœur francophone permettent de créer ce type de spectacle conceptuel, car il implique beaucoup de monde. On souhaite cependant que d’autres au Québec aient la chance d’entrer dans le fabuleux et inquiétant monde d’Enfant-Ville, même si c’est sous une autre forme que ce magnifique délire. Ce n’est pas de sitôt qu’on va oublier un tel spectacle.
À bientôt les amis-loups!
#CCF16
Ordre des chansons :
Né pour être sauvage
Downtown
Si proche et si loin à la fois
Nos bleus désirs
Le matin des raisons
Race-Pape
Black Swan (reprise de Thom Yorke)
Monsieur le psy
Ressac sur ta peau
Ton silence m’aspire
L’Amour au temps du cancer
Bonne journée
Alice
Dans ma tête
C’est tout oublié
Crystel
Héroïne
La moustache à papa et Lucy in the Sky with Diamonds (avec Carmen Campagne)
Le bonheur tousse moins qu’avant
Rappel :
Gaston
D’amour, de booze, de pot pis de topes
Photos : Courtoisie Coup de cœur francophone/Jean-François Leblanc
Texte révisé par : Annie Simard