Un concept intriguant qui rapporte
©Victor Diaz Lamich / Festival international de Jazz de Montréal 2017
Par : Marie-Claude Lessard
Concept en vogue à Montréal depuis quelques mois, un film en concert constitue à présenter un long-métrage sur grand écran dans une salle de spectacle alors qu’un orchestre interprète la trae sonore en temps réel. Après la projection symphonique d’Amadeus de Milos Forman et Harry Potter à l’école des sorciers (la version en concert de Harry Potter et la chambre des secrets est prévue à la Place des Arts les 21 et 22 octobre), c’était au tour de la comédie musicale La La Land de prendre d’assaut la Salle Wilfrid-Pelletier, hier soir, dans le cadre du Festival international de Jazz de Montréal. Ce choix s’avérait tout naturel : le film, lauréat de six Oscars, traite de jazz et est l’un des plus acclamés et vus de 2016. En effet, quoi de mieux pour une oeuvre rendant hommage à l’âge d’or d’Hollywood que de s’inspirer de la belle époque où la musique et le bruitage se produisaient directement dans la salle?
Devant une salle presque comble composée d’un public de 7 à 77 ans, l’Orchestre Métropolitain conduit par Erik Ochsner a élégamment débuté avec la pièce Ouverture avant que ne se déploie en version anglaise sous-titrée en français l’irrésistible idylle entre Mia Dolan (Emma Stone) et Sebastian (Ryan Gosling), cette aspirante actrice et ce musicien de jazz carburant aux rêves et à l’espoir. L’absence du créateur de la musique oscarisé pour cet effort, Justin Hurwitz, alors qu’il était annoncé qu’il serait présent dans toutes les publicités promouvant l’événement, a légèrement déstabilisé et déçu, mais la troupe d’Oschsner l’a rapidement fait oublier.
©Victor Diaz Lamich / Festival international de Jazz de Montréal 2017
La synchronisation des musiciens avec les séquences du film a vivement impressionné. Aucune mesure n’était en retard ou en avance. L’orchestre a osé quelques élans d’improvisation lors des scènes où Sébastien joue dans les bars. Cependant, lors de certains moments, la musique enterrait les dialogues. Il était quand même aisé de s’y habituer au bout de deux ou trois chansons. En revanche, le pli horizontal au centre de la toile déconcentrait tout au long du visionnement. Bien que la foudroyante et inexplicable chimie entre Emma Stone et Ryan Gosling éclipsait lors de certaines séquences phares ce qui s’étalait sur la scène, l’Orchestre Métropolitain a évidement brillamment réussi à nous plonger plus en profondeur dans l’univers en livrant impeccablement les mélodies. L’intermission d’une vingtaine de minutes, quoique compréhensible, a hélas quelque peu freiné cette magie.
Le public applaudissait généreusement après chacune des pièces. Le piano de City of stars et la fusion de tous les titres du film sur la poignante Prologue a fait frisonner toute la salle, la submergeant d’un émouvant mélange de tendresse et de mélancolie. Malheureusement, l’aménagement des instruments sur la scène ne mettait pas en valeur le piano et la trompette, deux grandes vedettes de La La Land. Il fallait les chercher du regard pendant de longues minutes.
©Victor Diaz Lamich / Festival international de Jazz de Montréal 2017
Montréal a accueilli la version épurée de La La Land in concert, celle sans danseurs et feux d’artifice, ce qui n’a point empêché à l’auditoire de passer un excellent moment. Les couleurs des éclairages qui changeaient au gré de celles présentées dans l’œuvre de Damien Chazelle apportait efficacement une touche de théâtralité, même si certains accessoires du film (l’enseigne du bar de Sébastien, notamment) auraient aussi été les bienvenus.
Bref, La La Land in concert séduit les oreilles et transmet avec brio la déclaration d’amour que le film décerne à tous ces artistes rêveurs qui embellissent notre monde.
Texte révisé par : Marie-France Boisvert