Accepter notre extraterrestre intérieur
Par : Marie-Claude Lessard
Le passage solo d’Alexandre Bisaillon au Zoofest représente une merveilleuse audace : celle de rassembler 60 minutes de nouveaux délires en faisant fi des angoisses s’y rattachant. Dans O.N.V.I (Objet non volant identifié), l’humoriste de 26 ans admet lui-même s’être imposé ce défi pour aller au-delà de ses craintes existentielles et autres hypocondries. Le résultat surprend, réjouit et porte à réflexion, ce qui fait de ce spectacle le trésor caché du festival.
À mi-chemin entre absurdité et humour engagé, le style d’Alexandre Bisaillon ne se confine dans aucun genre, sa folie s’avère bien trop unique et rafraîchissante pour cela. Ses observations d’apparence bizarre parviennent à trouver écho dans le quotidien des spectateurs, même si certains exemples sèment parfois la confusion. L’artiste prend un malin plaisir à exagérer dans ses comparaisons pour susciter des mimiques dégoûtées ou perplexes chez le public. D’ailleurs, il ne se gêne pas pour dialoguer avec lui, commenter à chaud la chimie, ce qui contribue à apporter une ambiance chaleureuse et détendue dans laquelle personne ne s’empêche d’exprimer avec fougue ses réactions.©Martin Métivier / ZooFest
Évidemment, la référence spatiale contenue dans le titre ne relève pas du hasard. Alexandre Bisaillon dévoile pourquoi tous devraient embrasser leur côté extraterrestre. En toute transparence, l’humoriste aborde ses travers, ses fréquents séjours hospitaliers pas particulièrement glorieux et ses épisodes plus sombres. Sa vision sur la religion, les répercussions désastreuses d’une colère refoulée et l’acceptation des différentes cultures (tout aussi sinon plus riches que la nôtre) entraîne un bon nombre de rires francs et de petites remises en question. L’écriture de Bisaillon est à l’image de sa présence scénique : dynamique, frénétique, maîtrisée. Plusieurs gags efficaces s’enchaînent dans le même deux minutes. Les spectateurs s’ investissent alors d’emblée , ne voyant pas l’heure passer.
En ce sens, le public quitte l’intime Cabaret du 4e du Monument-National satisfait que ce dernier ait été bien rempli. Il espère non seulement que cela se répète pour les représentations à suivre, mais qu’Alexandre Bisaillon ait la chance de faire rayonner davantage son univers atypique, car des extraterrestres aliénés par notre mode de vie effréné que nous sommes, nous en avons bien besoin.
Texte révisé par : Louisa Gaoua