La chanteuse se dévoile davantage dans un récit culinaire
Par : Johanne Mathieu
Lara Fabian a troqué le micro pour les fourneaux! La chanteuse signe en effet le magnifique récit culinaire Je passe à table, publié aux Éditions Libre Expression.
Dans cet ouvrage, il y a tout d’abord les recettes : caponata aigre-douce, crevettes papillon et salmoriglio, gratin d’endives à la belge, soupe aux fraises, stoemp aux poireaux et au lard salé, tiramisu… Des recettes qui attirent instantanément l’œil et l’intérêt ,et qui sont sublimées par une superbe facture visuelle. Mais ce livre de cuisine est beaucoup plus que ça. Pour chaque recette proposée, un événement significatif s’y rattache. Dans un récit qui se veut gourmand mais aussi autobiographique, Lara Fabian remonte son parcours jusqu’à ses origines. C’est l’histoire de sa vie, de sa famille, de sa carrière, de ses amours, de ses amitiés. C’est aussi un projet qui a mûri pendant longtemps.
« Ça fait plusieurs années que je pensais à ça, souvent, de m’éditer pour que je me raconte à travers une autobiographie ou d’une biographie, et je trouvais qu’il y avait un accès un peu pompeux, un peu redondant. Comme je suis quelqu’un de généralement assez transparente et authentique, je voulais trouver un angle qui permet, à mi-parcours à tout le moins, de me raconter, mais en prenant un peu de hauteur, en y mettant un peu d’humour, un petit grain de sel. Je me suis rendu compte que le fil rouge de tous ces récits, c’était la table. Les événements de ma vie les plus fondamentaux, qui m’ont apporté le plus grand nombre de joies, mais aussi de sacrifices, se sont faits d’une façon ou d’une autre autour d’une table. L’impératif, c’est que ça fasse sens, pour moi aussi, de me raconter. »
La mémoire culinaire est très présente dans ce récit. Une mémoire faite du quotidien qui tourne autour de la préparation des repas, des hivers passés en Sicile et de plats aux saveurs exceptionnelles et aux couleurs vives. Cette passion pour la cuisine est bien sûr associée aux plaisirs du palais et aux souvenirs. Mais aussi à la culture. Née d’un père belge et d’une mère sicilienne, la chanteuse passe aisément du beurre à l’huile d’olive, comme elle passe de l’italien au français. Ses souvenirs ont voyagé entre les deux cultures de ses parents, mais celles-ci côtoient également toutes celles dont elle s’inspire maintenant.
Pour elle, la table symbolise la famille, les amis, le réconfort, la gratitude et le partage. Ce sont des moments qui permettent de « convoquer la joie », des conversations bruyantes, des gestes d’amour, des repas interminables et des occasions de refaire le monde. Elle symbolise aussi la tradition. Une longue tradition de transmission qui se perpétue de femme en femme, de génération en génération. L’héritage reçu est celui d’un art de vivre et d’un art d’être, qui vont bien au-delà de la cuisine. Et quelles sont ces traditions qui lui ont été léguées notamment par les femmes de son entourage?
« Probablement l’écoute, la faculté d’entendre ce que l’autre a à nous dire et à quel point c’est important quand tu le fais librement parce qu’il est posé devant un mets qui lui fait plaisir ou qui réconforte. […] Mais peut-être, la plus importante, c’est que l’amour est une vibration, pas un sentiment devant lequel il faut réagir, mais une sensation, une vibration par laquelle il faut être traversé pour créer notre vie. Moi, j’ai vraiment vécu ça avec elles : se laisser traverser par la vibration d’amour pour inventer et créer notre vie. »
Période sombre et défis
Tout ramène Lara Fabian à la table, les grands moments comme les moins bons. À une certaine époque, elle a connu une période plus sombre où« manger » est devenu un vrai défi.
« On comprend en vieillissant plus essentiellement que trop manger ou ne pas assez manger, l’un ou l’autre, peut être un vrai problème. Moi, j’ai envie d’être une fille en bonne santé, j’ai envie de vieillir en bonne santé. Ce que j’ai pu me faire avec de la nourriture, dans le bien comme dans le mal, je pense que je ne maîtrisais pas vraiment à ce moment-là à quel point c’était important, à quel point nous sommes ce que nous mangeons, comment nous sommes dans le même état que dans les cas où l’on est lorsqu’on mange. »
Elle a dû par ailleurs faire face à une toute nouvelle réalité, en raison de son intolérance au gluten, dont le diagnostic s’est plutôt fait de manière originale comme le découvriront les lecteurs. Elle a dû s’adapter, « mettre ses bottes de randonnée », devant ce défi qui lui est apparu comme une montagne, mais qui au final, s’est transformé en aventure culinaire, en une occasion d’explorer, de découvrir de nouveaux produits et d’adapter ses recettes italiennes. On retrouve donc dans le livre des recettes qui proposent des options sans gluten, des plats qui permettent malgré tout de réconforter.
Récit vivant
Cette autobiographie gourmande pourrait bien ne pas être le livre d’une seule fois et faire facilement l’objet d’un deuxième tome, puisque l’artiste a encore bien des histoires et des recettes en réserve. L’idée d’écrire dans un autre genre littéraire, par exemple un livre jeunesse, fait aussi son chemin dans son esprit. Avec un réel talent pour écrire et se raconter, celle-ci a su transformer les histoires de Je passe à table en récit vivant et captivant.
Pour Lara Fabian, s’il y a une chose qui rallie les gens, c’est la nourriture, le goût, la table, et tous les moments sont bons pour s’y retrouver. Gageons que les récits et les recettes que contient ce livre en rallieront plus d’un également.
Image à la une : © les libraires.ca