Les oiseaux ivres, aux petits oiseaux
Par : Marie-Hélène Amyot
C’est dimanche dernier qu’avait lieu le Gala Cinéma Québec. Après avoir foulé le tapis rouge, les artistes se sont réunis au légendaire studio 42 de la grande tour pour célébrer le cinéma québécois et ses acteurs.
Petites pointes d’humour bon enfant de Geneviève Schmidt, animatrice de cette 24e cérémonie plutôt sobre, sans grandes anecdotes extraordinaires, mais avec un magnifique hommage aux disparus : Jean-Claude Lord, Roch Demers et Jean-Marc Vallée, personnalités marquantes du milieu du cinéma. Au son du violoncelle de Jorane et de la voix de Fred Pellerin, ce fut un moment émouvant, tout autant que les souvenirs relatés par Marina Orsini, Danielle Proulx et Vincent Bolduc à leur sujet. En douceur, avec grand respect.
Somme toute, cette grande soirée a fait plusieurs heureux, dont quelques-uns avec qui j’ai pu m’entretenir.
Commençons avec ce qu’Hélène Florent avait à dire en salle de presse, après avoir reçu le prix pour Meilleure interprétation féminine, rôle de soutien. Hélène d’ailleurs qui a également été récompensée pour Meilleure interprétation féminine, premier rôle pour le long-métrage Les oiseaux ivres.
Mattv : De quelle façon ce prix-là se distingue par rapport aux autres récompenses que tu as reçues en télévision ?
Hélène Florent : En télévision, les prix que j’ai reçus, c’était du public. Donc c’était vraiment un amour du public. C’est à une autre place, là, c’est les pairs. C’est vraiment l’actrice face aux autres acteurs, actrices, producteurs, gens de l’industrie. Ça s’inscrit ailleurs, ça me fait vraiment plaisir.
La jeune comédienne, qui en était à son tout premier film, Sara Montpetit, repartie avec l’Iris de la Révélation de l’année, pour son rôle titre du film Maria Chapdelaine.
Sara Montpetit : J’ai oublié de remercier ma petite sœur, alors je me sens mal.
Mattv : Comment elle s’appelle ta petite sœur ?
Sara Montpetit : Emma Perreault et je voulais tellement lui dire que je l’aime. Mais sinon, je me sens… Je n’arrive pas à décrire comment je me sens. Je me sens simplement contente, touchée, extrêmement touchée, surtout recevoir ce prix en présence de Louise Portal à côté.
Mattv : Quel est ton meilleur souvenir du tournage ?
S. M. : J’en retiens tellement ! Mais je pense que c’est vraiment le lieu ou on a tourné. On était en nature, éloigné de la ville, coupés de tout. Même qu’on ne savait pas qu’il y avait une pandémie, pendant un temps parce que la pandémie a éclatée durant notre tournage. On était tellement isolés. Je me souviens des décors, de l’ambiance, c’était comme avoir traversé un portail. On a pris une machine à voyager dans le temps, on était tellement dans ce monde-là, je pense que c’est ce souvenir-là qui me marque.
L’Iris hommage cette année, fut remis à la comédienne Louise Portal. Avec 50 ans de carrière, cette grande comédienne, qui a également remis le prix de la Révélation de l’année, en compagnie de Kelly Depeault, détentrice du même prix l’année dernière. Encore remplie d’émotions, voici ce qu’elle nous a dit, en sortant de scène.
Mattv : Est-ce qu’on s’attend à recevoir le prix hommage, après 50 ans de carrière ?
Louise Portal : Je n’y pensais pas, mais quand elle me l’a dit, je savais que je le méritais. C’est sûr ! Mais tu sais, en 50 ans, j’ai été souvent nominée, j’ai souvent passée si proche de d’autres trophées, mais j’en ai juste 4 chez nous. C’est pas énorme en 50 ans. Il y a des artistes qui en ont bien plus que ça. Parce que c’est particulier, les jurys, puis le public qui vote. Mais là au moins, l’Iris hommage, il n’y a pas personne qui peut te l’enlever. (rires) Je dirais qu’il arrive dans un bon moment. D’abord, je me trouve choyée parce qu’on sort de la pandémie, du confinement. C’est comme une célébration pour tout le monde. Regarde, on peut se parler, on n’est pas obligées d’être masquées, c’est merveilleux. Ensuite, c’est un très beau gala. Puis moi, j’ai beaucoup aimé Les Rendez-vous (du cinéma québécois), j’ai été présidente du C.A. pendant 4 ans, au début des années 2000, je travaillais avec Ségolène. Maintenant c’est Sylvie qui est là qui est formidable. Je connais plusieurs membres du C.A. C’est comme si le monde fait « Bravo Louise, tu as été avec nous autres tout ce temps-là, non seulement sur le grand écran, mais dans notre cœur tout le temps. » J’ai toujours été une ambassadrice de notre cinématographie sur des jurys internationaux. J’ai tourné à l’étranger avec des cinéastes aussi. J’ai tourné avec les jeunes, j’ai fait dix-sept cours métrage.
Mattv : En 50 ans de carrière, est-ce que c’est possible de nommer une production à laquelle vous avez participé, qui a été vraiment marquante, tout au long de cette grande carrière-là ?
L. P. : C’est sûr que Le déclin de l’empire américain, je l’ai toujours dit, ç’a été mon passeport, parce que c’est ce qui a fait que j’ai fait des films à l’étranger. Tout le monde avait vu ce film-là, tout le monde l’avait aimé. J’ai représenté Denys (Arcand), la veille des Oscars, j’ai passé une semaine au Brésil pour accompagner les 2 films de Denys puis c’est moi qui en faisait la promotion. Donc c’est sûr que Denys est dans ma vie. Denys Arcand, c’est quelqu’un d’exceptionnel. Maintenant, dans la nouvelle génération, j’ai beaucoup aimé travailler avec Sophie Deraspe. Les loups, pour moi, Maria demeure un personnage… Le film aurait pu s’appeler Maria, les loups, tellement j’ai aimé mon personnage. Mais tu sais, chaque rôle a quelque chose à nous apporter. Je pense au rôle que j’ai joué dans Le garagiste avec René Beaulieu. J’ai compté mes répliques, je pense que j’avais… 8 répliques. Mais la présence, ce que j’avais à faire là-dedans, j’accompagnais ce personnage qui va mourir, cet ancien amour, c’était tellement riche avec Normand, que pour moi, ça demeure un souvenir éblouissant. Là, il y a juste Ricardo (Trogi), je n’ai pas eu assez dans Le guide de la famille parfaite. Je vais lui dire tantôt, il m’en doit une ! (rires)
Lors du dévoilement du Prix du public, une personne en particulier eut l’air très surpris, le principal intéressé, Yan England pour le film Sam, mettant en vedette, Antoine Olivier Pilon. Il repart donc une 2e fois avec ce prix, remporté antérieurement pour le film 1 :54, dont le personnage principal est aussi Antoine.
Mattv : On dit « Jamais deux sans trois. », as-tu des projets avec Antoine ?
Yan England : Pas nécessairement tout de suite avec Antoine, c’est sûr que j’ai une prochaine idée de film et tout ça, puis il y a d’autres super beaux projets qui vont s’en venir et tout… Je suis un peu superstitieux, ça fait que quand les choses vont se concrétiser, je pourrai en parler, mais d’ici là, c’est ça. Mais oui, il y a de belles affaires qui s’en viennent.
Vincent-Guillaume Otis, quant à lui, reparti avec l’Iris pour la Meilleure interprétation masculine, premier rôle, pour son personnage d’Éric Asselin, complice de Vincent Lacroix, dans le film Norbourg.
Mattv : Quel a été le plus grand défi pour composer ce rôle-là ?
Vincent-Guillaume Otis : Ç’a été de m’imprégner puis apprendre tout ce qui est le jargon, vocabulaire fiscal. La force de ce personnage-là, c’est le cerveau, en fait. C’est le cerveau de tout le scandale de Norbourg. Moi, il fallait que je rende le personnage crédible, c’est un comptable, c’est une bosse de mathématique.
Mattv : Toi, tu n’es pas une bosse de mathématique ?
V.-G. O. : Oui, j’ai toujours eu de la facilité en mathématique. En fait, ç’a été facile pour moi d’apprendre tout ça, mais il a fallu que je le fasse, il a fallu que je travaille. Il a fallu que je comprenne chaque mot, chaque terme. C’est très complexe, ça reste très complexe. Au final, l’histoire du film c’est simple. C’est des escrocs qui volent des gens, mais sinon la façon dont ça s’est fait. Et c’est ça l’histoire du film. Ç’a été ça, le gros défi.
Cette soirée en salle de presse fut composée de belles rencontres, de beaux échanges au sujet de petits bijoux, qui rappellent que notre cinéma québécois n’a rien à envier aux autres.
Voici la liste complète des gagnants de la soirée.
Meilleure interprétation féminine │ Rôle de soutien
Hélène Florent (Maria Chapdelaine)
Meilleur premier film
Sin La Habana (Kaveh Nabatian)
Meilleure interprétation masculine │ Rôle de soutien
Claude Legault (Les oiseaux ivres)
Meilleur court métrage │ Animation
La grogne (Alisi Telengut)
Meilleur court métrage │ Documentaire
Perfecting the Art of Longing (Citra Kahana)
Meilleur court métrage │ Fiction
Les grandes claques (Annie St-Pierre)
Meilleur film documentaire
Comme une vague (Marie-Julie Dallaire)
Meilleure réalisation
Les oiseaux ivres (Ivan Grbovic)
Meilleur scénario
Les oiseaux ivres (Ivan Grbovic – Sara Mishara)
Révélation de l’année
Sara Montpetit (Maria Chapdelaine)
Meilleure interprétation masculine │ Premier rôle
Vincent-Guillaume Otis (Norbourg)
Meilleure interprétation féminine │ Premier rôle
Hélène Florent (Les oiseaux ivres)
Prix du public
Sam
Meilleur film
Les oiseaux ivres
IRIS Hommage
Louise Portal