L’impossible quête

Par : Jean-Claude Sabourin

À la fin des années 80, les régimes communistes tombaient un peu partout, semant des images fortes dans l’imaginaire collectif. On se souvient des berlinois détruisant le mur de leurs mains ou de l’étudiant chinois affrontant et stoppant une colonne de blindés qui se dirigeait vers la place Tiananmen à Beijing. Le théâtre Jean-Duceppe présente Chimerica jusqu’au 17 février, une pièce qui se penche sur le sort de ce héros pékinois sans nom et sans visage.

Ce spectacle multicouche nous transporte alternativement des États-Unis, patrie du jeune photographe qui a immortalisé ce moment, à la Chine des années 2012/2013 qui se propulse à la tête des nations grâce à sa nouvelle puissance économique. Le photographe a vieilli, mais son cliché continue de l’habiter. Qu’est-il advenu à cet individu téméraire qu’il a capté avec son objectif? S’il était toujours de ce monde et vivant en Amérique?

L’alpha et l’oméga de la recherche qu’il amorce tourne autour d’un citoyen chinois ordinaire qu’il connaît depuis plusieurs années. Grâce aux informations que celui-ci lui a fournies, l’américain se met donc en tête de retrouver l’homme de la photo et sa quête devient un entêtement.

Un peu de gloire

La recherche du photographe est jonchée d’égratignures des principes éthiques et de petits sacrifices, alors qu’elle réveille chez son interlocuteur chinois des fantômes de son passé. Un effet « Brimstone and Treacle » se met en place, où le mauvais donne naissance à la divulgation de vérités insoupçonnées. Une vérité qui procure enfin un peu de gloire à des héros chinois oubliés.

Certains de ceux-ci ont tout perdu, d’autres n’avaient plus rien à perdre. Seul le parti communiste chinois s’est retrouvé victorieux, assoyant son pouvoir sur le peuple chinois pour des décennies et étendant ses tentacules dictatrices partout dans le monde. On trouve d’ailleurs un certain courage chez les quelques acteurs de Chimerica qui sont d’origine chinoise, d’avoir accepter de jouer dans un spectacle qui ne plait assurément pas au régime.

Par ailleurs, la mise en scène de Charles Dauphinais nous fait bien sentir le déclin occidental face à un gouvernement chinois omnipotent. Un gouvernement communiste qui musèle la bravoure de son peuple et de toute vérité qui vient avec. En Chine, les valeureux se battent avec deux sacs de plastiques contre une colonne de blindés.

Les interprètes de la pièce sont : Shiong-En Chan, Alexandre Goyette, Yuu Ki, Tania Kontoyanni, Albert Kwan, Derek Kwan, Marie-Laurence Moreau, Li Li, Philippe Racine, Manuel Tadros, Marie-Hélène Thibault, Annie Yao. Les billets sont disponibles au théâtre Jean-Duceppe.