Le Théâtre du Vieux-Terrebonne aux ambiances des années 60
Par: Sara Bouhenni
Jeudi dernier, le festival ComédieHa! et les Productions Martin Leclerc présentaient à la salle Desjardins du Théâtre du Vieux-Terrebonne la pièce Moi…et l’autre, une adaptation de la série culte du même nom autrefois interprétée par les emblématiques Dominique Michel et Denise Filiatrault. Les textes soigneusement revisités par Kim Lévesque-Lizotte et une mise en scène parfaitement orchestrée par Charles Dauphinais ont mené à l’aboutissement d’un chef-d’œuvre qui a charmé les spectateurs du premier acte au dernier.
Dès l’ouverture des rideaux, les premiers personnages à passer sous les feux des projecteurs sont le gentil et un peu niais concierge de l’immeuble, Gustave, en duo avec le nerveux gérant de l’immeuble, M. Lavigueur. Leur dialogue empreint de la réalité difficile vécue par la classe ouvrière à l’époque révèle toutefois une belle complicité entre les deux bougres. Par la suite, entrent en scène les colocataires Dominique et Denise, deux artistes de cabaret aux mœurs légères et à l’esprit libre et indépendant. Un profil qui ne correspond pas aux coutumes et mentalités on peut plus conservatrices durant ces années-là, où le patriarcat trônait encore.
L’extravagance des deux attachantes complices décroche de nombreux rires tout au long de leur performance. Plus tard, l’arrivée appréhendée des propriétaires de l’immeuble, les Clarks, dont la réplique est plus particulièrement donnée à Mme Clarks, une bourgeoise anglophone traditionaliste, bouleverse le quotidien des deux protagonistes. L’intégralité de la pièce de théâtre est tissée de mimésis historiques ravivant une douce nostalgie teintée de fierté.
Un concours tonitruant
Le point culminant de l’histoire réside dans l’annonce d’un concours de talent organisé par un chanteur de charme mégalomane d’origine française, Hébert Léotard. Le grand prix étant un voyage pour deux à Paris, Dominique et Denise y voient tout de suite l’occasion de profiter des beautés et des opportunités de la Ville de l’Amour. Cependant, leur amitié est mise à rude épreuve lorsqu’elles commencent à se disputer l’attention du bellâtre, lequel semble s’éprendre de toute femme croisant son chemin, un vrai don Juan! Elles se distancient malgré elles au fur et à mesure que Denise entretient une idylle avec Hébert et que Dominique se retrouve à militer auprès d’un mouvement féministe avec son amie et barmaid du cabaret, Johanne Hébert. Parallèlement, elle réussit à obtenir le poste d’assistante personnelle du chanteur Hébert et fait de troublantes découvertes quant à ses réelles intentions.
Coup de théâtre!
Alors que l’immeuble tout entier est ébranlé par de nouvelles règles contraignantes imposées par Mme Clarks, outrée par le train de vie des deux locataires anticonformistes, Denise contourne habilement la situation à son avantage à l’issue d’une soirée arrosée passée avec la propriétaire. Celle-ci lui confesse certains dérapages qu’elle aurait eus elle-même et les deux femmes réalisent qu’elles ont bien plus en commun qu’elles ne le pensent. De son côté, Dominique étale au grand jour la supercherie d’Hébert. Désenvoutée par le chanteur, Denise se réconcilie avec sa fidèle amie Dominique, laquelle lui propose, contre toute attente, de l’emmener à Paris. Le 5e acte de la pièce est rempli de péripéties rebondissantes qui clôturent merveilleusement bien cette œuvre théâtrale.
Moi…et l’autre est un bijou d’adaptation prodigieusement joué par tous les comédiens. C’est près de 2 heures consécutives de rires, de sourires, d’analogies, et de souvenirs d’une époque cruciale qui a marqué l’histoire du Québec de maintes façons. Une nation qui se définit, des femmes qui s’affirment et une exposition qui fait briller la province à l’échelle mondiale, il y a de quoi être fier! Moi…et L’autre prévoit d’autres représentations dans le cadre de sa tournée québécoise, faîtes vite!