L’aventure invisible, ou quête de l’identité

Par : Luc Lecavalier
Une rencontre improbable entre trois personnes qui cherchent à se définir – ou pas. Telle serait la façon la plus sobre de décrire L’Aventure Invisible, nouvelle pièce présentée au Théâtre Prospero. L’œuvre à l’origine réalisée par le metteur en scène, auteur et réalisateur suédois Marcus Lindeen et la dramaturge et traductrice Marianne Ségol immerge le public dans une mise en scène qui le rapproche au maximum des personnages et de l’histoire.
Le public prend place dans une petite salle, assis dans des gradins circulaires à trois étages pouvant accueillir au maximum une cinquantaine de personnes. Dans la dernière rangée du bas, au centre, sont assis les trois acteurs, qui prennent place en même temps que les spectateurs et que l’on identifie qu’en raison de leur micro.

Perdre une part de soi mais rester soi-même
D’un coté, un·e artiste (Mo Bolduc), obsédé·e par le travail de la photographe queer Claude Cahun, qui la pousse à constamment se redéfinir. De l’autre, une neurologue (Binéka Danièle Lissouba) qui est, ironiquement, victime d’un AVC à l’âge de 37 ans et qui lui fait perdre complètement la mémoire. Enfin, un homme de 45 ans (Alexis Grimard) ayant subit deux greffes du visage, car la première ayant rejeté la chirurgie, qui lui donne l’apparence d’un homme de 25 ans. Tous inspirés de vraies personnes, interviewées et consultées pour la pièce originale, ces personnages ne sont cependant jamais nommés.
Cet échange fictif de témoignages réels se veut remarquablement crédible et donne l’impression que ce sont bien ceux qui ont vécu ces récits qui les racontent. L’homme qui décrit comment son système a rejeté sa première greffe, la première greffe du visage de l’histoire, et qu’il a du passé six semaine sans visage en attendant un nouveau donneur. Un supplice qui l’amène, pour la première fois de sa vie, à souhaiter la mort de quelqu’un.

Un travail d’acteur remarquable
Comment la neurologue a réussi à contacter de l’aide pendant son AVC, alors qu’elle est seule chez elle et avec la moitié de ses capacités cérébrale en moins. Elle décrit comment elle avait « l’impression de naître à nouveau » après son accident, elle qui a oublié son identité, ses souvenirs, le visage de ses proches, la façon dont elle souriait et encore. Néanmoins, elle est sereine et tente d’en tirer du positif. « Les gens me trouvent plus sympathique depuis mon AVC! »
Le jeu d’acteur solide aide certainement à cette immersion, bien que le scénario semble un peu forcé et brise le rythme par moment. À l’exception de la pénombre entre les quatre actes de la présentation, la pièce reste bien éclairée, ce qui a pour effet d’enlever un peu le rôle du spectateur au public. On a la sensation d’être davantage inclus dans cette conversation particulière, d’être un peu comme des figurants sur scène en compagnie des personnages.

La pièce est présentée jusqu’au 1er novembre. Visitez le site du théâtre pour les billets.
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