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Race

Les préjugés mènent le monde

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©Caroline Laberge

Par Sébastien Bouthillier

Race convoque le spectateur du Théâtre Jean-Duceppe comme juré. La pièce le confronte à ses préjugés, mais le plonge aussi dans la bonne conscience qu’il se donne pour s’en excuser. Ses pensées sur les rapports hommes-femmes, riches-pauvres, jeunes-vieux et Noirs-Blancs l’acculeront à la honte. Du moins, c’est ce que veulent éviter les avocats assumant la défense dans un cas de sévices sexuels.

Un riche homme blanc (Henri Chassé) accusé du viol d’une pauvre femme noire est défendu par deux avocats associés, un Blanc et un Noir (Benoît Gouin et Frédéric Pierre). La question est loin d’être s’il a réellement commis l’acte dont on l’accuse. Les procureurs chercheront l’élément spectaculaire qui impressionnera le jury et qui le détournera de la rectitude politique commandant qu’il déclare l’accusé coupable.

Pour David Mamet, auteur de la pièce, la vérité importe peu. « La race, comme le sexe, est un sujet sur lequel il est impossible de dire la vérité. Dans chaque cas, le désir, l’intérêt personnel et l’image de soi font que la vérité est embarrassante à partager, non seulement avec des étrangers, mais aussi avec les membres de son propre groupe, et certainement avec soi-même », selon une déclaration de cet Américain au New York Times.

Les répliques fusent comme des sentences assénées par saccades, sans appel possible. Courtes, comminatoires, virulentes. Grâce à la traduction québécoise de Maryse Warda, le rythme devient presque musical.

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Les avocats ont davantage le souci du lucre que celui de servir la justice. Sauf qu’ils éprouvent aussi des remords, englués dans leur bonne conscience et les préjugés ambiants qu’ils contribuent à propager. La stagiaire (Myriam De Verger) ne semble pas exempte de « racisme inversée », et son geste fatal pour le sort du client est-il motivé par la vengeance ou la recherche de la justice?

« Tout repose sur des mensonges. Lorsque le mensonge est avéré, la pièce est finie », constate Mamet dans son entrevue au New York Times.

Au théâtre Jean-Duceppe jusqu’au 27 mars.

Crédit photo de couverture : Caroline Laberge