Joe, Jack et John révèlent les didascalies de Samuel Beckett
© Frédérique Ménard Aubin
Par Sébastien Bouthillier
Les annotations de l’auteur en exergue d’une pièce ou d’un scénario forment des didascalies. Elles indiquent aux metteurs en scène, aux comédiens et aux scénaristes comment son œuvre devrait être présentée au public. En quelque sorte, il s’agit des dernières volontés de l’auteur sur l’œuvre avant que d’autres artisans du spectacle ne se l’approprient.
Minutieux, scrupuleux et perfectionniste, Samuel Beckett a noirci ses textes de didascalies. Aujourd’hui, près de 27 ans après son décès, les légataires détenteurs des droits sur son œuvre exigent le respect de ses intentions avant d’accepter les propositions qu’ils reçoivent.
La compagnie théâtrale Joe, Jack et John a justifié son choix de jouer quatre courtes pièces de l’écrivain irlandais dont En attendant Godot a moussé la renommée. Elle endosse la mission de placer à l’avant-scène l’antihéros. Pour ce faire, elle sélectionne les acteurs que la société perçoit comme des marginaux dans leur vie quotidienne. Michael Nimbley et Gabrielle Marion-Rivard, acteurs professionnels ayant une déficience intellectuelle, grimpent ainsi sur les planches.
« Beckett a développé dans sa dramaturgie une panoplie d’anonymes plus démunis les uns que les autres. Le spectateur qui observe un acteur handicapé en scène a généralement tendance à lui attribuer une charge de désespoir et de courage devant l’adversité… autant de traits qui caractérisent également les personnages beckettiens », explique la metteure en scène Catherine Bourgeois.
Accompagnés de Marc Béland et de Guillermina Kerwin, ils prêtent leur voix aux mots de Beckett. Cet Irlandais, prix Nobel de littérature en 1969, réfutait l’étiquette d’absurde attribuée à ses pièces. Certes, il imagine des personnages sans caractère, des individus qui se dédoublent, s’isolent et surgissent de nulle part. Reste que le pessimisme de Beckett quant à la condition humaine est incontesté.
Donc, quatre courtes pièces que Beckett nommait « dramaticules », constituent Abîmés, entre chorégraphies et installations dont n’émane que du silence… entrecoupé de quelques paroles dépourvues de signification. Dans Pas, une fille enfermée par sa mère qui fait les cent pas, prisonnière d’une relation sans issue.
L’Impromptu d’Ohio relate une peine d’amour comme s’il était possible de s’en remettre. Quoi où présente un interrogatoire, mais aucune réponse ne convient et chacune offre un prétexte à l’interrogateur pour justifier son autorité. Les images du Souffle sont diffusées sur écran, elles servent d’intermèdes entre les pièces.
Jusqu’au 22 octobre à la Salle Fred-Barry
Texte révisé par : Marie-Eve Brisebois