Baldwin toujours aussi pertinent !
En sortant de la salle de cinéma hier, j’étais bouleversée, en fait je le suis encore en écrivant ces lignes. Je ne savais plus trop par où commencer pour vous en parler. Une des premières choses qui m’est venue à l’esprit est que dans le fond cette impression d’avancement, (certains ont même parlé d’Amérique post-raciale) n’était en fait qu’une illusion. Il y a des nuances à apporter, mais tout de même, à la lumière des événements chez nos voisins du Sud en particulier, il est claire que les mots de Baldwin sont non seulement encore pertinents mais prémonitoires.
Le synopsis
I Am Not Your Negro prend comme point de départ les écrits de James Baldwin dans lesquels il dévoile ses impressions personnelles à la suite de l’assassinat des leaders Malcolm X, Martin Luther King, Jr. et Medgar Evers. Des entrevues et des images d’archives y sont superposées pour se pencher sur l’histoire du racisme aux États-Unis d’hier à aujourd’hui. Les images sont percutantes et crues. Depuis hier, elles me hantent. On passe d’images d’émeutes dans les années 60 à celle de Ferguson, par exemple et on se dit qu’on ça n’a pas tant changé.
©Photo courtoisie de Magnolia Pictures
Ce film va remettre en question tout ce qu’on pense savoir et avoir compris sur les relations raciales aux États-Unis. Certes des avancées ont été faites, mais il y a encore beaucoup à faire. Les images choisies par Raoul Peck, d’hier à aujourd’hui, le manuscrit inachevé de Baldwin (narration de Samuel L. Jackson) sont le miroir de l’hypocrisie de la société américaine, de son double discours et de ce que Baldwin nomme clairement « sa pauvreté émotionnelle abyssale ».
La rencontre
Pour moi ce film, c’est aussi une rencontre entre le réalisateur (Raoul Peck) d’un film qui m’a marqué comme enfant « L’homme sur les Quais » et les mots d’un auteur avec lequel j’ai fais réellement connaissance dans un cours de littérature afro-américaine comme jeune adulte. Cette rencontre entre deux univers qui me passionnent : le cinéma et la littérature se cristallise autour ce de constat très dur et bouleversant. Et comme l’écrit Franco Nuovo, « une des choses frappantes que révèlent ce documentaire, c’est que la lecture de l’histoire, des événements, des films, des discours n’a jamais été la même pour l’Afro-Américain que pour l’Américain blanc du nord ou du sud. » La fracture sociale est la trame de fond de ce film.
C’est donc un regard très dur et d’une grande acuité que porte Peck sur l’échec de l’American Dream, les mots de Balwdin dans une fervente narration de Samuel L. Jackson. Même après avoir vu ce film et à peine remise de mes émotions, comme l’a dit Balwin à propos de l’avenir, « je ne peux être être pessimiste, je suis en vie. » Le film distribué au Québec par Métropole Films sort le 24 février en salle et sera présenté à Montréal en version avec sous-titres français au Cinéma Du Parc, au Cinéma Quartier Latin et en version originale anglaise au Cinéma AMC. Il sera en avant première, le 23 février par les RIDM dans le cadre du Mois de l’Histoire des Noirs. et prendra l’affiche le 24 février.
Texte révisé par : Ho-Chi Tsui