Quand la beauté apaise
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Par : Johanne Mathieu
La contemplation de la beauté est-elle un baume contre la laideur et la douleur? Parvient-on à guérir de ses blessures émotionnelles en se confiant à un tableau ou en peignant? Cette semaine, un roman mêlant art, beauté et tragédie : Vers la beauté, de David Foenkinos, paru chez Gallimard.
Deux âmes en détresse émotionnelle, un homme et une jeune fille, deux destins liés par un drame. Antoine, professeur aux Beaux-Arts de Lyon, vit une rupture amoureuse. Un jour, valise à la main, il décide de tout plaquer, sans explication et laissant ses proches dans le désarroi, pour devenir gardien de salle au musée d’Orsay. Camille, elle, est une jeune artiste talentueuse et prometteuse, qui soudainement, perd goût à la vie, mais perd également tout intérêt pour sa passion, celle de peindre. Quel drame les unit? En plus de la tragédie, autre chose lie Antoine et Camille : l’art. Pour survivre, les deux protagonistes se tournent vers la beauté et son côté apaisant. Mais l’art, malgré toute la beauté qu’il peut engendrer, est-il suffisant pour faire disparaître les pires souffrances?
L’histoire, séparée en quatre parties, est présentée sous deux points de vue différents : celui d’Antoine et celui de Camille. Dans la première demie du livre, il est question d’Antoine, du drame qu’il cache et qui l’ébranle complètement, un drame qui lui fait abandonner tout ce qu’il aime pour essayer de faire face au traumatisme qu’il vient d’éprouver. On est intrigué par ce personnage particulier qui cherche l’anonymat au milieu de la foule, qui veut éviter de créer des liens et qui aime se confier au portrait de Jeanne Hébuterne, muse de Modigliani. Dans la deuxième demie, la voix de Camille s’élève pour nous faire découvrir toute l’ampleur du drame qu’elle a vécu. Brillante et pleine de vie auparavant, elle se sent désormais morte intérieurement et en proie à des crises. Deux personnages qui croulent sous la culpabilité et l’horreur d’un évènement tragique faisant tout basculer, et qui luttent pour ne pas sombrer. Au final, on découvre la vérité de chacun et on est témoin de leur long chemin à parcourir pour trouver l’apaisement.
L’écriture de l’auteur est fluide et habile, passant d’une note un peu plus légère, teintée parfois d’un peu d’humour, à une montée dramatique qui atteint son apogée à la toute fin. David Foenkinos sait aussi bien nous faire entrer dans l’univers de l’art, qui fait figure de refuge, que dans celui de l’horreur. Ce roman nous happe par sa réalité cruelle, où la beauté réussit tout de même à transpercer l’ombre. Une œuvre très sensible, à couper le souffle.
Vers la beauté, de David Foenkinos (2018), Éditions Gallimard, Paris, 224 pages.
Texte révisé par : Annie Simard