Retrouver ses repères grâce aux leçons de japonais faciles
Par : Sébastien Bouthillier
Depuis qu’il a quitté le Québec, Samuel (Jean-Philippe Perras) s’imagine en voyageur intrépide. Il se déclare citoyen du monde. Sans attaches, sa seule obligation consiste à satisfaire immédiatement ses désirs. À Tokyo, il multiplie les conquêtes amoureuses et se moque des Japonais, qu’il vole ou insulte impunément comme le tenancier M. Tanaka (Miro Lacasse). Cellulaire en main, il se débrouille grâce à l’application pour apprendre le japonais destinée aux voyageurs, dont Michel-Olivier Girard est le professeur.
Lorsque Claude (Daniel Gadouas) croise le jeune homme, Sam feint d’ignorer le français pour éviter de lui répondre. Le sextagénaire vient de tout perdre à Montréal, il a été remercié de son travail par manque de connaissances des nouvelles technologies. Il veut commettre un suppeku, une sorte de hara-kiri, au pays du Soleil levant le jour où la plus récente usine de son ancien employeur y sera inaugurée.
Le destin des deux Québécois qui perdent leurs repères pour des raisons différentes se croise à Tokyo. Plongé dans cette culture étrangère, la signification des mots, des idées et des situations qu’ils vivent leur échappe même dans leur langue maternelle. Le sens qu’ils donnent à leur existence s’estompe jusqu’à disparaître. La traduction les confondra, et ils perdront leur repères. « Tu parles quatre langues, mais tu ne sais même pas qui tu es », reproche Claude à Sam. La quête de liberté emprunte le chemin de la fuite, puis de l’errance.
La mise en scène de Charles Dauphinais campe l’action dans le petit bar de M. Tanaka, adjacent à la célèbre piss alley. C’est comme si le public était assis derrière le zinc près des acteurs. Jean-Philippe Lehoux s’est mérité le prix Gratien Gélinas en 2013 pour l’écriture de cette pièce, jouée pour la première fois cet automne. Aussi auteur de Napoléon voyage, il affirme que ses périples autour du monde l’inspirent. Sayônara!
À la salle Fred-Barry du Théâtre Denise-Pelletier jusqu’au 24 septembre.
Crédit photo de l’image à la une : Théâtre Sans Domicile Fixe
Texte révisé par : Annie Simard