Mécanique générale à l’oeuvre
© Gabriel Talbot/MatTv.ca
Par : Maxime D.-Pomerleau
Après une première présence remarquée au festival Montréal Complètement Cirque en 2015, la dynamique troupe de Québec Machine de cirque ouvre en grand la 15e saison de la TOHU. Un spectacle pour les amateurs de théâtre physique aux propositions concrètes et pleines d’humour!
Machine de cirque c’est Raphaël Dubé, Maxim Laurin, Yohann Trépanier, Ugo Dario et Frédéric Lebrasseur, tout ce beau monde dirigé par le concepteur Vincent Dubé. Ils évoluent dans un univers industriel, où le métal des structures contraste avec la souplesse des corps. L’échafaud s’avère particulièrement intéressant lors du numéro de trapèze, où l’acrobate utilise le cordage pour faire son propre contre-poids.
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Les numéros les plus efficaces sont ceux se déroulant à l’avant-scène, où l’on peut voir tout le talent des artistes dans leur justesse, leur rapidité ou leur flexibilité. Comme en témoignent les moments où le groupe entoure le musicien à la batterie, jonglant avec les objets qui les entourent. Un clin d’œil à Charlie Chaplin et Les temps modernes (auquel nous fait penser le fonctionnement de la machine-décor) avec les chapeaux melons qui changent de main et de tête plus vite qu’un battement de cil!
D’ailleurs, chapeau au 5e Beatle qu’est Frédéric Lebrasseur, homme-orchestre aux 1000 talents. La présence et la précision du musicien le rendent essentiel non seulement au déroulement des numéros, mais sans lui ils n’auraient pas la même saveur. Le compositeur tire le meilleur des objets usuels qui nous entourent et les transforme en flûte géante ou en antenne satellite aux sons futuristes de fax. On blâmera son enthousiasme débordant pour la batterie trop agressive par moments.
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L’échevelé clown Ugo Dario revêt un simple veston blanc et une rose à l’œillère pour partir à la recherche de la perle rare à séduire parmi le public. Ce sera tout un voyage pour la demoiselle, qui ira au restaurant, au cinéma, danser en discothèque en plus de faire un tour de moto, le tout sans que les acolytes de Dario ne soient jamais loin! Un autre segment où le design sonore de Lebrasseur, qui tient le rôle plus discret du bruiteur, est à souligner. Cependant, à l’ère de #metoo et des discussions autour du consentement, il serait intéressant de repenser la fin, où la jeune femme doit embrasser le clown plein d’espoir (ou se laisser embrasser). Un baisemain pourrait clore joliment le numéro, en évitant tout malaise potentiel.
Après un avant-goût d’équilibrisme sur vélo, le numéro de l’unicycle, mené avec brio par Raphaël Dubé, est toujours aussi réussi. Sous les airs d’un spectacle d’hypnotiseur douteux, appuyé par une musique aux émanations synthwave, il rivalise d’ingéniosité avec les unicycles toujours plus gros qu’on lui apporte. Le pauvre Ugo est pris en otage, alors que les autres gars, en caricatures d’assistantes, remporteraient un prix pour leurs expressions faciales tordantes.
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Vient ensuite le moment tant attendu des serviettes, devenu la marque de commerce de Machine de cirque. Imaginé par le duo Trépanier-Dubé, il prend des proportions fabuleusement grotesques lorsqu’on intègre les autres à l’histoire! En dire plus, ce serait trahir l’excellence de ce numéro coquin alors on vous invite à aller les voir en chair et en os (surtout en chair) à la TOHU, jusqu’au 14 octobre. Vous pouvez aussi visionner leur vidéo Les Beaux-Frères, en prestation au Plus Grand Cabaret du Monde. Le numéro a récolté près de 40 millions de vues, toutes plateformes confondues.
Pour nous laisser le temps de nous remettre de nos émotions, le groupe s’offre une petite pause et retourne bidouiller sur la machine, avant de tous s’installer sur la planche coréenne. Soutenu par les simples notes de guitare de Lebrasseur, le quintette tente d’atteindre l’équilibre parfait, pour aussitôt le faire voler en éclats! La communication est un élément clé dans ce numéro enlevant, développé par Dario et Laurin, qui ont fracassé en 2016 le record Guinness du plus grand nombre de sauts périlleux arrière en planche coréenne. Le portrait final des cinq artistes en équilibre sur la planche est une image forte du travail d’équipe de Machine de cirque. Un homme seul ne peut s’élever aussi haut que lorsque propulsé par ses confrères. Ensemble, l’appareil ne sert à rien s’il n’y a pas cohésion.
© Gabriel Talbot/MatTv.ca
Revoir le spectacle nous permet non seulement d’apprécier les performances, mais surtout la complicité des cinq artistes. Leur franche camaraderie nous donne envie d’être avec eux sur scène. Machine de cirque baigne dans une chimie qui s’acquiert au fil des heures de recherche et de travail, de shows et de tournées, passées ensemble. Une mécanique humaine qui carbure à la passion et à l’huile de bras.
#laTOHU
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Texte révisé par : Annie Simard