Quand la musique prend vie
Par : Ariane Monzerolle
Avec Plus grand que nature, le chef d’orchestre australien Nicholas Carter nous plonge au cœur de trois opéras et ballets ayant pour thème l’amour et le désir. Les écouter sans les danseur.se.s ou chanteur.se.s qui ajoute à l’interprétation de ces œuvres, nous permet de vraiment prendre conscience de l’univers musical entourant ces œuvres et même de s’en réapproprier l’arc narratif.
1er mouvement : Mozart
Pour débuter cette soirée, Nicholas Carter présente Idomeneo, premier opéra mature de Mozart. On nous explique avant le spectacle qu’habituellement cet opéra se conclut par une prestation de ballet, chose qui était très courante à cette époque, ce qui fait qu’on se laisse souvent absorber par la prestation plutôt que par la musique. Pourtant, cette pièce est un régal pour les oreilles. Ses différences rythmiques et ses accélérations de tempo lui donnent un ton fort et joyeux, qui amorce bien la soirée.
Par contre, je dois avouer que c’est la partie de la soirée qui m’a le moins marqué. Pourtant, je suis une grande admiratrice de Mozart ! L’orchestre était très juste, mais peut-être qu’il manquait un peu de nuance. Quand je ré-écoute la pièce, il y a un petit côté enivrant que je n’ai pas l’impression d’avoir retrouvé lors de ce passage. Mais c’est sans doute le seul commentaire constructif que j’aurais à faire et j’ai l’impression que c’était seulement dans ce passage précis.
Les morceaux choisis lors de ce passage étaient par contre parfaits pour débuter la soirée. Ce sont des morceaux complets par eux-mêmes et on peut facilement les écouter sans avoir à écouter l’opéra en entier.
2e mouvement : Glazounov
Sans doute, un de mes moments favoris de la soirée, le passage de Karen Gomyo, violoncelliste solo accompagné de l’orchestre qui s’attaque au Concerto pour violon en la mineur par Glazounov. Une pièce qu’on nous dit en début de soirée, compliquée d’un point de vue technique. Difficile, puisqu’elle est en mouvement continu, il n’y a donc jamais de temps mort et touche beaucoup de tendance musicale. Et c’était une réussite totale et je n’étais pas la seule à le penser avec l’acclamation totale du public.
Ce fut moment haut en émotion, l’interprétation de la violoncelliste était magnifique et unique, une vraie virtuose. La pièce commence avec des ensembles très langoureux et séducteur, un peu comme une femme fatale qui se glisse doucement dans l’action. Ensuite la pièce prend plus une tournure mélodique, que je qualifierais de romantique. Puis, on continue avec des sonorités plus tristes. Et ce n’est que le début, l’interprète nous amène dans une gamme d’émotions en passant par l’impatience, la colère, la peur. Définitivement un chef-d’œuvre et Karen Gomyo s’est montrée à la hauteur de ce défi.
Elle fait preuve d’une très belle sensibilité et elle possède une prestance qui permet à la pièce de prendre vie dans notre imaginaire. Et l’orchestre permet d’amplifier ce solo ce qui a transformé ce moment en moment magique. Définitivement, un moment inoubliable et incomparable.
Je vous laisse même le lien vers la pièce originale de Glazouov pour vous donner une idée de l’ampleur et la beauté de cette pièce
3e mouvement : Stravinski
La soirée se termine avec le ballet Petrouchka de Stravinski.
Pour résumer rapidement, c’est l’histoire de trois marionnettes qui prennent vie : Petrouchka, le Maure et la ballerine. Petrouchka est amoureuse de la ballerine, mais le Maure aussi. Nous sommes donc au centre d’un triangle amoureux qui se terminera par la mort de Petrouchka, tuée par le Maure.
On est dans une pièce avec un caractère très enfantin, puisque Petrouchka découvre, comme une enfant, plein d’émotions. Et c’est par la musique qu’elle les exprime. C’est une pièce qui est aussi très dramatique, puisqu’on parle d’un amour tragique qui ne peut se résoudre que par la mort d’un des deux soupirants de la ballerine, Petrouchka ou le Maure. Finalement, la pièce ayant très merveilleux nous fait une réfléchir sur la réalité de toute l’action, était-ce vrai ou simplement notre imagination ?
L’orchestre interprète cette pièce avec brio. On sent la présence de ces trois personnages dans la musique, leurs intentions et leurs désirs. On se sent submergé par les sonorités et on peut facilement imaginer ce qui se passe. Les forces de l’orchestre sont vraiment dans les moments de crescendo et de forte, c’est-à-dire lorsqu’on monte en intensité dans les instruments. Aussi, une petite mention au trompettiste solo Antoine Mailloux et à la flutiste solo Marie-Andrée Benny qui a vraiment porté leurs moments en donnant de belles interprétations solides.
Je peux donc facilement dire que c’est une réussite pour Nicholas Carter et l’orchestre métropolitain. C’est une belle lettre d’amour pour ces œuvres de la part du chef d’orchestre. Il réussit à nous les faire vivre d’une manière unique et rafraichissante. Même s’il s’agissait d’un chef invité, il avait une belle connexion avec l’orchestre et ensemble iels ont su rendre les pièces vivantes. Je vous recommande fortement d’attendre son prochain passage à Montréal.
Si comme moi, vous n’étiez jamais allée voir un spectacle de l’orchestre métropolitain, je vous encourage fortement à regarder leur programmation, il y a un réel effort de rendre le tout accueillant et inclusif soit avec un balado tournant autour des pièces et leurs sens ou avec des causeries avant la prestation afin de mieux comprendre la pièce qui suivra.
C’était ma première fois, mais pas ma dernière fois ! Une belle réussite pour l’orchestre métropolitain.