La nostalgie de la peur
© Warner Bros
Par : Normand Pineault
Il a fallu plusieurs années avant que le maître de l’horreur, Stephen King, se décide à écrire une suite à l’un de ses plus grands chefs-d’œuvre, The Shining. Elle a fini par sortir sur les rayons en 2013, mais l’auteur gardait une certaine crainte face à une envisageable adaptation au grand écran, puisqu’il avait lui-même détesté la version cinématographique réalisée par Stanley Kubrick en 1980, qui différait énormément du roman original. C’est donc le réalisateur et scénariste Mike Flanagan (The Hunting of Hill House) qui, avec l’approbation et la collaboration de King, réussit avec brio aujourd’hui à adapter non seulement le roman de Doctor Sleep, mais à clore également la boucle de l’histoire créée par le film de Kubrick, sans toutefois quelques bémols apparents.
22 ans se sont écoulés depuis que Dany Torrance (Ewan McGregor) s’est échappé de l’hôtel Overlook et de ses fantômes. Maintenant adulte, et après avoir vaincu ses propres démons, il tente de refaire sa vie en tant qu’aide-soignant. Mais, voilà que grâce à ses dons, il fait la connaissance de la jeune Abra (Kyliegh Curran), qui lui demande son aide pour vaincre Rose (Rebecca Ferguson), la dirigeante d’une secte appelée le True Knot, qui se nourrit de ce même pouvoir afin de rester immortel. Pour y arriver, Dany devra alors rouvrir une porte de son propre esprit qu’il croyait avoir fermé pour de bon.
Comparativement aux films d’horreur bon marché d’aujourd’hui, Doctor Sleep a la décence de garder l’aspect d’horreur psychologique du classique original, ce qui en fait donc un film beaucoup plus dérangeant qu’effrayant. Un ou deux moments vous feront peut-être sursauter, mais sans plus, car c’est plus l’aspect étrange et sinistre de l’ambiance qui vous submerge. Une particulière scène de torture pourrait même en choquer plus d’un, mais plus par le sujet malsain que par la gratuité de la violence. La claustrophobie du décor de l’hôtel Overlook étant maintenant remplacée par l’étendue dégagée d’une petite ville du New Hampshire, nous avons aussi l’impression qu’un ingrédient particulier manque à l’appel pour retrouver le niveau d’horreur original. Cela n’affecte toutefois pas la trame de cette histoire qui cette fois-ci joue dans un registre différent.
Passé cette comparaison inévitable, le film en lui-même se tient très bien, et l’histoire bien ficelée, à la progression lente, mais efficace, est soutenue par de solides performances de la part d’Ewan McGregor, mais surtout par celles de Rebecca Ferguson et de Kyliegh Curran, qui en est à son premier rôle au grand écran. Malgré un bon développement, la présence de la secte et de ses membres laisse aussi un peu à désirer en tant que méchants, mais on passe outre pour mieux apprécier l’histoire. Là où par contre les opinions seront le plus divisées, ce sera lors du dernier acte et de la finale. Car, nous avons là une brisure du rythme, et ce, rien que pour gaver les amateurs d’une très forte nostalgie du film et du roman original.
Malgré sa durée discutable de 2 h 31 et de quelques longueurs, il n’en reste pas moins que Doctor Sleep demeure l’un des meilleurs films d’horreur psychologique de l’année et une suite digne du classique du cinéma qu’est The Shining.
Doctor Sleep, en salle partout au Québec dès le vendredi 8 novembre 2019.
Texte révisé par : Johanne Mathieu