L’intemporalité des sœurs March
Par : Mylène Groleau
C’était soir de première au Théâtre Denise-Pelletier en ce jeudi 17 mars dernier pour la pièce Quatre filles et ainsi être transporté au nouvel an 1862. Époque très cruciale pour la destinée des sœurs March. Les présentations se poursuivront d’ailleurs jusqu’au 9 avril prochain. Une pièce à ne surtout pas manquer.
L’histoire des Quatre filles du Dr March a connu diverses adaptations cinématographiques. L’œuvre autobiographique de Louisa May Alcott, Little Women connaît maintenant son adaptation dans un texte de Julie-Anne Ranger-Beauregard avec une mise en scène de Louis-Karl Tremblay.
Quatre Filles, incarnées par Rose-Anne Déry, Laetitia Isambert, Sarah Anne Parent et Clara Prévost, entourées de Dominique Quesnel et Mattis Savard-Verhoeven, nous présente l’émancipation des sœurs March en tentant de conserver leur personnalité qui se définit pour certaines dans l’art et pour d’autres dans le besoin de s’accomplir auprès des leurs.
Dans une petite ville du Massachusetts, dans une Amérique en pleine guerre de Sécession, vivent les quatre sœurs March : Meg l’aînée romantique (Clara Prévost), Jo l’idéaliste et future romancière à l’esprit indépendant (Rose-Anne Déry), Beth la pianiste affectueuse (Sarah Anne Parent) et Amy la vaniteuse et déterminée (Laetitia Isambert) font l’apprentissage de la vie, découvrant ce qu’elle a à leur offrir… et ce qu’elles devront réclamer. Entre les vertus conservatrices et leurs envies de subversion, les quatre filles apprennent à créer elles-mêmes leur bonheur, à défendre leurs désirs et à survivre aux griffes de la désillusion. Avec leur ami Laurie (Mattis Savard-Verhoeven), elles traverseront le passage éprouvant entre l’adolescence et la vie adulte, sans jamais abandonner leurs espoirs entêtés.
L’humour fraternel
De cet amour familial, Jo la résumerait pour mieux l’écrire ainsi : Si nous étions une histoire, elle commencerait maintenant!
La pièce, ici, connaît son adaptation de Julie-Anne Ranger-Beauregard de façon plus moderne avec des termes accessibles pour tous. Le jeu et la complicité des comédiens sont plus qu’à la hauteur des attentes du public. L’humour qui entoure la relation fraternelle est, pour sa part, une exquisité.
Il existe entre eux un lien indescriptible qui rend la pièce sensible et empreinte d’un atmosphère de connivence.
Des scènes improvisées
Des instants riches de l’histoire et, probablement impossible de recréer sur scène, nous sont délicatement proposés en monologues pour raconter les événements comme, par exemple, lorsque le poids d’Amy cède sous la glace. Jo raconte, alors, la situation selon les émotions qui l’envahissent. Une description émotive qui teinte la destinée relationnelle des deux sœurs.
Ou encore, lors d’échanges d’envois postaux, qui se traduisent en lecture d’échanges à haute voix. L’interprétation permet au public de poursuivre l’histoire tout en se relatant intérieurement le scénario, les descriptions du vécu de chacune loin des autres. Permettant ainsi une avancée de l’histoire sans, toutefois, rien y perdre.
Quand la scène se métamorphose
La scène est constamment en mouvement selon les diverses pièces principales où se déroule l’histoire. Tantôt salon familial qui réunit en son centre les quatre sœurs et leur invités, tantôt coin lecture chez la tante March. Ou, encore, deviendra le salon du voisin Théodore avec, comme point central, le piano dont rêve secrètement Beth de pouvoir y jouer des œuvres célèbres. Nous propulsera, plus tard, en outre-mer lors du périple d’Amy auprès de sa tante March.
Un décor qui se transforme au gré de l’histoire, des saisons et des années et ce, de façon rapide, logique et efficace.
Une scénographie remarquable. Des costumes d’époque étoffés, de dentelle, de pierres précieuses et de satin qui, en fait, camouflent une situation familiale qui s’est appauvrie depuis la guerre qui sévit.
Les absents n’auront pas toujours tort
Le seul petit bémol que le public pourrait retenir est l’absence de certains personnages comme John Brook, le futur époux de Marguerite qui, absent sur scène à son propre mariage, se voit toutefois présent lors des échanges entre les sœurs. Ou, lorsque Théodore tente d’imiter celui-ci avec un accent prononcé et caricatural. On imagine facilement un homme exigeant et autoritaire auprès de son épouse.
Mary March, la figure maternante et rassembleuse du quatuor n’est aucunement mentionnée. Seule présence autoritaire de tante March qui laisse une trace de se complaire sur l’éducation des jeunes femmes ou, une volonté de se choisir au détriment d’une vie épanouie au bras d’un richissime prétendant.
Le personnage caricatural de Tante March interprétée par Dominique Quesnel vaut largement le détour. On aimerait la détester mais par son humour, elle charme le public à tout coup. Son sens de la réparti soutien le scénario qui a remporté plusieurs éclats de rire durant toute la soirée.
Le voisin, Théodore, est, quant à lui, un point central qui rallie l’histoire et les personnages tout au long de celle-ci. Faisant le lien entre tous. De sa complicité amoureuse envers Joe, de sa bienveillance envers Meg et de son choix amoureux lors du voyage outre-mer auprès d’Amy.
Les présentations se poursuivent jusqu’au 9 avril prochain. Pour l’achat de billets c’est ici.