Vianney : plaisir coupable
© Jean-Marc Lubrano
Péché mignon musical
Légèreté assumée, voix feutrée sur textes niais couleur pastel : description d’un plaisir coupable.
C’est une foule relativement timide qui a accueilli le jeune Vianney mercredi 15 juin pour une deuxième soirée aux Francofolies et pour la première fois au Québec. Bien coiffé, propre sur lui, jeans et chemise blanche à l’image de son album, le jeune parisien aux allures de premier de la classe semble encore sonné par le décalage horaire, ce qui ne l’empêche en rien de parsemer sa prestation de blagues à l’encontre d’un public québécois qui reste à conquérir.
Seul sur scène avec pour unique compagnie sa guitare, Vianney Bureau s’adresse Aux débutants de l’amour avant d’exprimer son admiration pour la chanteuse suédoise Veronica Maggio avec le titre Veronica.
Désireux d’être perçu comme un artiste accessible, impassible face à la célébrité, Vianney a su tourner la petite taille de la scène Sirius XM à son avantage, soudainement intimiste et inondée d’une douceur musicale. Musicien dans l’âme, la force de Vianney, qui chante aussi depuis l’âge de 12 ans, réside dans ses mélodies. Les gens sont méchants, chante-il sur un ton innocent, accompagné d’un texte empreint de son expérience auprès des sans-abris, auxquels il apporte de l’aide dans le cadre de l’opération Hiver solidaire à Paris.
Quitte ou double
Quand Vianney s’attaque à des incontournables de la chanson française avec une reprise du légendaire Je ne suis pas un héros de Daniel Balavoine, c’est un sans-faute vocal. La troublante version de Dis, quand reviendras-tu ? de Barbara, reprise dans l’édition deluxe de son album, confirme un talent d’interprète indiscutable. Entonnés à coup de lalala et de rimes pauvres et faciles, Labello et Chanson d’hiver dénotent justement d’un manque cruel de recherche quant à la composition des textes. À l’ère où l’on requiert d’un artiste qu’il soit polyvalent sinon rien, Vianney ferait mieux de poursuivre à contre-courant en optant pour la collaboration et l’entretien de ses talents de ménestrel contemporain, ses rythmes et sa voix.
Impossible pour l’ancien scout de ne pas reprendre le titre qui l’a extirpé de l’anonymat en 2014, Je te déteste, dans lequel Vianney évoque avec humour la désillusion amoureuse. Et c’est pourtant un premier album fondamentalement optimiste qui éclos comme l’indique son titre et sa pochette méli-mélo aux couleurs fraîches et rose pâle.
Amour sans société
Sorti en 2014, Idées blanches paraît après un parcours atypique pour l’auteur-compositeur-interprète, qui est passé sans transition de l’uniforme de Saint-Cyr à une formation en école de mode. L’opus, qui comprend 12 morceaux parlant avant tout d’amour et de liberté, l’auteur français le décrit comme étant autobiographique, inspiré de ses multiples voyages et road-trips à vélo. Né de parents mélomanes et sacré artiste masculin aux Victoires de la musique 2016 en février dernier, le chansonnier de 25 ans fuit les textes engagés et dit lui-même qu’il parle mieux d’amour que de société. Naturellement sensible et philanthrope, Vianney incarne une bonhomie rafraîchissante et sans fioritures, incapable de ne pas séduire, dont la sympathie ne saupoudre pas seulement le premier rang. Et puis, en fin de compte, sa spontanéité décomplexe : le coup de cœur est assumé.
De retour à Montréal sur la scène de L’Astral le 27 octobre, Vianney reprend pour conclure le fameux Pas là, deuxième gage de son ascension fulgurante et de l’incroyable musicien qui garde contre vents et marées la tête sur les épaules.
Texte révisé par : Louise Bonneau