Des pas perdus… retrouvés!
Par : Annie Dubé
Créé en 2018, mais représenté seulement au printemps 2022 au Centre du Théâtre d’Aujourd’hui, la pièce Pas perdus – Documentaires scéniques fait son retour sur la scène du Théâtre du Nouveau Monde, au grand plaisir de ceux qui n’ont pas eu la chance de la découvrir l’an dernier.
Le projet, signé par Anaïs Barbeau-Lavalette et Émile Proulx-Cloutier, offre une expérience unique, qui sait réinventer comment on peut librement raconter une histoire. Conçue à partir de témoignages recueillis lors d’entretiens intimistes, sans caméra ni performance, on est au coeur de quelque chose de plus profond qu’une mode éphémère ou qu’une curiosité vintage.
Chacun son histoire
C’est bien l’une des grandes beautés de ce projet : celui de permettre la souveraineté narrative de chacun de ses participants sur scène, l’un après l’autre. Ce qui nous aide à filer une trame narrative qui les lie tous ensemble, par leur amour de la gigue traditionnelle québécoise.
Jeunes et moins jeunes de divers horizons et régions du Québec nous font vivre un petit morceau de leur histoire personnelle afin de tisser ce qui est un matériau commun, celui des pas de danse qui se perdent dans la culture avec le changement des époques, sous le regard tranquille et attentif de Anaïs Barbeau-Lavalette qui les accompagne sur scène, tout ouïe.
On remonte alors aux origines de cette danse, parfois jugée d’un autre temps, ce qui permet au public de se réapproprier le charme de cette pratique, tant solo que collective.
D’une grande sensibilité, les témoignages vocaux sont parfois illustrés poétiquement par des animations qui tracent le visage de ces histoires personnelles. Ensemble, ils forment un tout plus grand, le nôtre, ou celui qui pourrait être le nôtre, si on faisait plus attention au patrimoine intangible qui s’effrite, mais dont certains gardiens prennent encore soin, dans l’ombre ou sur les planches des scènes folkloriques.
Un patrimoine intangible à conserver
Si vous avez le moindre danseur de gigue caché en vous, il risque de se réveiller et de taper du pied durant certains passages de ce spectacle unique en son genre.
Personellement, ils m’ont convaincue! Je l’avoue : j’ai googlé les cours de danse traditionnelle, soulevée par la subtile force de ces pas entrainants qui nous relient au passé et au futur. On se dit même : imagine comment les gens vivraient mieux ensemble si plus de gens savaient swinger. Sérieusement : imaginez ce qui serait alors possible de créer comme nouveaux pas de danse entre nous, en tant que collectivité! Inspirant…
L’émotion de certains des artistes que l’on découvre dans cet espace précieux de l’imaginaire qui se matérialise lors des ovations du public a eu de quoi faire vibrer les âmes les plus insensibles, tant elle se lisait comme une vérité criante, touchante.
C’est une œuvre non seulement à voir, mais à conserver bien au chaud dans son cœur et sa mémoire pour la garder vivante.
Jusqu’au 2 mars 2023 au TNM, pour les billets c’est par ici. Faites vite : ça en vaut la peine et c’est générateur de joie!
Recherche et entrevues : Anaïs Barbeau-Lavalette.
Conception narrative et mise en scène : Émile Proulx-Cloutier
Assisté à la mise en scène par Charlotte Ménard
Sur scène : Dominic, Elisabeth, Eva, Jérôme, Quentin, Réal, Sylvain, Yaëlle, accompagné·e·s de Anaïs Barbeau-Lavalette.
Équipe de création : scénographie Julie Vallée-Léger, éclairages Mathieu Roy
Musique originale Guido Del Fabbro
Conception sonore Ilyaa Ghafouri
Accessoires Dominique Coughlin
Images et animation 2D Marielle Dalpé
Collaboration à la recherche et mise en mouvement Yaëlle Azoulay
Crédit photo de couverture : Valérie Remise
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