Le festival où on ne dort pas
©Louis Laliberté / LeFestif
Par : Francis-Olivier LeBlanc
Vous ne connaissez pas encore l’existence du Festif de Baie St-Paul dans la belle région de Charlevoix? Votre chance, c’est que c’est la dernière année que vous le manquez!
En plein cœur de Baie St-Paul, du 21 au 24 juillet 2016, des milliers de festivaliers ont envahi les rues pour savourer la musique en tout genre. Folk, punk, pop, rap, electro, disco, rock, reggea et j’en passe. La scène Desjardins, (la principale) installée dans la cours de l’école primaire, donne l’impression que l’artiste en prestation sur la scène est là pour l’épluchette de blé d’inde d’un ami (qui a vraiment beaucoup d’amis disons). L’ambiance est décontractée et familiale. On s’approprie rapidement le site et la ville. On n’a pas vraiment le choix avec un décor aussi pittoresque.
De l’autre côté de la rue, le Chapiteau de La fabrique culturelle, juste devant l’église où se trouve une troisième scène (dans le sous-sol); dans ces deux dernières, c’est là que les « after » se passent. À 23 h 30 et à 00 h 45, d’autres spectacles commencent et donnent raison au nom du festival. Une petite marche vers l’aréna donne accès à une nouvelle scène cette année, le chapiteau Radio-Canada, ou en longeant la rue St-Jean-Baptiste, on arrive à la scène Hydro-Québec, dans le stationnement du St-Pub de la Microbrasserie de Charlevoix. C’est à ces deux scènes qu’on peut assister aux prestations en après-midi.
©Francis Gagnon / LeFestif
Par-dessus ça, il y a l’animation de rue et surtout les prestations surprises. Par exemple, Tire le coyote autour d’un feu à minuit ou Keith Kouna dans l’escalier d’une ruelle. Mais attention, il faut bien surveiller vos téléphones « intelligents ».
Le Festif est organisé selon les 16 principes de la loi du développement durable du Québec. En plus d’avoir la crème des programmations, c’est un pionnier au Québec dans l’organisation d’événements avec une philosophie de développement durable. Et ça ne veut pas seulement dire qu’il y a des bacs à recyclage sur le site, ça veut dire aussi la vente de produits alimentaires locaux uniquement, dont la bière! Pas de p’tite bière à gros prix, seulement de la bonne bière à bon prix, dans un verre réutilisable. Je vous le dit, elle goûte bien meilleure!
Je vous propose donc de faire un petit survol de ma fin de semaine en commençant par une citation d’un quidam alors qu’une fanfare s’apprêtait à jouer dans les rues à 2 h du matin pour un spectacle surprise : « Au festif, on ne dort jamais! ». Il n’aurait pu dire plus vrai.
©Francis Gagnon / LeFestif
Trafic de Montréal et de Québec, je suis donc arrivé au début de ce spectacle. Ambiance festive et joyeuse, le son de ce groupe montréalais saute entre disco, funk, soul et RnB. Les 9 membres donnent de la texture se mariant bien à la voix du chanteur qui me rappelait un peu la tonalité de Jamiroquai. Leur reprise de I try de Macy Gray était bien réussie, mais la foule semblait s’attendre à recevoir une prestation qui venait du cœur.
©Louis Laliberté / LeFestif
Ce groupe australien qui en était à sa deuxième visite a été présenté en nous disant qu’on avait doublé le système de son… je l’aurais triplé! Malgré la sortie de leur nouvel album Rising with the sun, ils ont tout de même joué leurs classiques tels que Two Shoes, In my pocket et The Chariot. Pas de doutes, le groupe était bien là par amour sincère pour nous avoir fait d’aussi longs solos. Chacun s’est amusé à quitter les pièces sournoisement pour y revenir avec intensité, nous montrant leur talent de musiciens.
©Louis Laliberté / LeFestif
Premier after qui commence en force dans le chapiteau. Chaque fois que les gars de Dead Obies montent sur scène, ça hurle et c’est chaud. Quand ils ont demandé à la foule s’ils savaient que des gens n’avaient pas pu rentrer, la réponse était au rendez-vous donnant l’occasion aux 5 MCs de passer leur message; qu’ils méritaient une plus grosse scène l’an prochain! Très coloré, le collectif prend l’espace qu’on lui donne et maîtrise les jeux de la langue.
EDITO : J’ai un reproche à la nouvelle génération de rappeur (suis-je déjà rendu vieux-jeu à 30 ans?) et ça ne s’applique pas qu’à Dead Obies. La culture hiphop comprend plusieurs disciplines, dont le rap. Rhythm and poetry. Et le rythme, quand il n’y a qu’un DJ qui a tout ce poids, il faut qu’il donne plus de place. Ce sont des bons beatmaker, mais l’art du scratch est de moins en moins présent… just sayin’.
Marion Sylvain
©Louis Laliberté / LeFestif
Jour deux, c’est une petite chanteuse du coin qui ouvre la soirée sur la scène principale. Elle a gagné la finale locale du concours Secondaire en spectacle et s’est méritée une bourse créée par les Sœurs Boulay. Malgré son jeune âge, elle a bien su utiliser son 15 minutes pour gagner de la crédibilité sur scène.
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Leur musique est entraînante, bien ancrée dans le patrimoine québécois par leurs chansons à répondre. Des expressions sorties d’un peu partout dans les plus petits villages de la province et un son de trad-garage. La clarinette et la trompette ajoutent un son gitan, et l’harmonica une touche de country pour avoir une belle sauce festive bien dosée.
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Je ne suis probablement pas le premier à écrire sur les Sœurs Boulay, mais je n’avais jamais eu la chance de les voir en spectacle. Il est très facile de tomber en amour avec elles. Ce sont de bonnes vivantes. Elles jasent avec leur public et ce sont des p’tites comiques. « Nous allons vous faire une reprise d’une chanson dont l’interprète originale n’avait pas le talent pour rendre justice à la chanson » … Céline Dion (pour que tu m’aimes encore). Wow, vous étiez partie pisser quand le bon dieu a distribué la modestie, les filles? Un spectacle léger comme de la ouate qui donne envie de sauter dans de la guimauve.
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Le groupe transmet l’ambiance planante et vibrante de leurs albums à la scène. Bien que le ton général soit mélancolique, le groupe réussit à faire bouger la foule. Ils ont joué leurs meilleures pièces des deux albums selon moi, à l’exception de Give up qu’ils ont oublié de jouer. Je ne l’ai pas compris! J’aurais aimé qu’il nous démontre un peu plus leur talent : avec un peu plus de solos ou en reconstruisant l’une de leurs chansons, mais ça, c’est seulement pour ne pas donner de note parfaite. Les musiciens avaient une belle présence sur scène, et là, le son était au rendez-vous!
©Francis Gagnon / LeFestif
Trio composé de deux frères rappeurs, l’un du groupe Alaclair Ensemble, l’autre dans Dead Obies, et du père. L’association donnait à l’album une texture et un son bien unique et frais. J’ai malheureusement été déçu par leur prestation. Peut-être que j’avais trop d’attente, car j’ai vraiment aimé leur album? Ou peut-être que la qualité du son n’était pas au rendez-vous? Ou bien, parce que le papa du trio n’a pas assez de présence scénique?
Impressionnant locuteur, Koriass manie le mic comme ceux de la vieille école. Petite référence à Kriss kross, remix des Étoiles filantes des Cowboys Fringants et beaucoup de hache tag, le positionne en plein contrôle de son époque. Je pourrais refaire mon édito au sujet des DJs, mais je vous invite à remonter à la critique de Dead Obies.
Malgré le soleil de plomb, la foule était encore au rendez-vous en cette 3e journée de festival pour danser et sauter sur la musique de Canailles. Chaque fois que je les vois, c’est littéralement un party de famille. Impossible de ne pas taper du pied (et ça c’est le minimum!).
©Francis Gagnon / LeFestif
Bête de scène, il a commencé à sauter avec ses pièces les plus connues : les oiseaux, les bottes, la vie n’est pas qu’une saloppe. Il a finalement arrêté de sauter à la fin de sa dernière chanson, C’est beau comme on s’aime.
Musicienne de grand talent, Ariane Moffatt évolue constamment. Au fil des années, elle a acquis la confiance totale de son public. Continuant d’évoluer, elle peut aujourd’hui initier les gens à la musique électro sans trop choquer. Tâche difficile d’éduquer un public, mais elle le fait avec beaucoup de patience. La prochaine étape sera de montrer les pouvoirs des montées enivrantes de l’électro. Chaque fois qu’elle construit une ambiance, la chute est trop rapide. Petit hommage à David Bowie avec une reprise de Let’s dance. Autre reprise, celle de Something in the air tonight de Phil Collins, très bien exécutée.
©Francis Gagnon / LeFestif
Un autre point fort du Festif, c’est la qualité de sa programmation. Ariane Moffatt n’aurait pas pu mieux mettre la table pour DJ Champion. Il s’est entouré cette fois-ci de deux chanteuses au son gospel nous amenant au ciel. Plus tôt, c’était Yann Perreau qui sautait tout le temps, là c’était la foule! Une heure et demie à sauter et j’en aurais pris d’autres.
©Louis Laliberté / LeFestif
Ce n’est pas un groupe que j’ai suivi tout au long de leur carrière, mais personne n’aurait pu deviner pendant le bingo de la semaine dernière que le sous-sol de l’église deviendrait aussi en feu. Après que mon oreille se soit adaptée à l’acoustique de la salle, j’ai pu constater que le groupe en a vu d’autres. Ils ont bien sûr joué leur classique gros tas de marde rendant la foule disjonctée. Imaginez la moitié du sous-sol de l’église dans un mosh pit. La formation maîtrise parfaitement leur style.
©Francis Gagnon / LeFestif
Je n’en pouvais plus de la chaleur dans le sous-sol, alors j’ai pu prendre l’air et entendre les dernières minutes de Violett Pi. Un son qui semble unique et original.
Finale de mon festival, Beat market. Duo électro au clavier et à la batterie, ils ont drainé toute l’énergie qui restait des festivaliers. Yann Perreau est venu faire une apparition pour nous témoigner à quel point il aimait les oiseaux… au point de se hisser au mât du chapiteau pour nous le chanter. C’est aussi ça le Festif!
À la sortie du chapiteau, à 2h, il y avait un autre spectacle surprise. Celui de la Famille Ouellette. Mais là, même si on ne dort jamais au Festif, toute bonne chose a une fin et c’est là que je me suis éteint!
L’an prochain, prenez-vous d’avance, car les passeports complets ont tous été vendus en 24 heures.
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Texte révisé par : Louise Bonneau