Un appel à la liberté et à l’amour
Par : Sylvie Tardif
Le 14 novembre dernier, la pièce Kukum adaptée du roman éponyme par Laure Morali était présentée au TNM. Almanda (Léane Labrèche-Dor) s’est avancée seule en scène, dans un premier temps, afin d’entamer la représentation sur une citation de Joséphine Bacon inscrite en épigraphe du roman de Michel Jean : « Je ne me souviens pas toujours d’où je viens dans mon sommeil, mes rêves me rappellent qui je suis, jamais mes origines ne me quitteront. »
Le coup de foudre entre Almanda, jeune Blanche francophone, et Thomas (Étienne Thibeault), un bel Innu, alors qu’il suivait un vol d’outardes, est d’une telle puissance qu’elle quittera Saint-Prime pour le suivre vers sa réserve de Pointe-Bleue. L’étincelle que cet amour a créée dans les yeux de Thomas ne le quittera plus jusqu’à son dernier souffle. Almanda apprendra la langue de son amoureux, l’innu-aimun, et les us et coutumes de la vie nomade en compagnie de son beau-père Malek (Jean-Luc Kanapé) et de sa belle-sœur Christine (Sharon Fontaine-Ishpatao).
L’adaptation théâtrale met l’accent sur cette belle langue innue dont une traduction française est offerte sur des écrans de chaque côté de la scène. Grâce à son courage, son goût pour la liberté et son amour, nous découvrons, à travers les yeux d’Almanda, la poésie de cette communauté rendue par Joséphine Bacon, qui a traduit certains passages en innu-aimun, agissant à titre de gardienne des savoirs innus.
La mise en scène d’Émilie Monnet est, à la fois, d’une grande douceur et d’une grande force. Si les images projetées sur un rideau de franges nous rappellent les difficultés de vivre sur un territoire magnifique et exigeant, et effleurent les drames vécus par les communautés autochtones et innues, les décors et les costumes des personnages sont légers et colorés. La joie, les rires, la tendresse des personnages les uns pour les autres nous les rendent attachants.
La vie choisie par Almanda n’aura pas été facile, mais elle aura aimé et elle aura été aimée. La scène finale est émouvante. À la fin de sa vie, cette femme-outarde drapée dans un manteau dont les manches sont des ailes se prépare à prendre son envol telle une outarde. Quelle magnifique image! Comment ne pas être ému par le destin d’une femme qui, par amour, a suivi l’homme qu’elle aimait dans un monde si différent du sien? Et si Michel Jean nous proposait tout simplement une réconciliation fondée sur l’amour.
Cette pièce d’une grande beauté est au TNM du 12 novembre au 15 décembre 2024 et elle sera ensuite en tournée au Québec. Le roman Kukum mérite également d’être lu et relu.